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Livres

Un duo en quête des incunables volés aux capucins de Fribourg

Cela fait 22 ans que Romain Jurot et Jean-Robert Gisler traquent des imprimés précieux volés aux capucins de Fribourg durant la Seconde Guerre mondiale puis en 1975

Romain Jurot, à gauche, et Jean-Robert Gisler dans les réserves de la BCU où sont conservés les incunables des capucins.

19 mai 2023 à 17:37

Incunables » Ils forment un duo d’une efficacité qui force le respect. Une paire de redoutables enquêteurs d’un genre très particulier, traquant depuis déjà 22 ans une vingtaine de livres anciens et précieux volés aux capucins de Fribourg durant la Seconde Guerre mondiale puis en 1975. Romain Jurot, chef du secteur manuscrits, incunables et archives de la Bibliothèque cantonale et universitaire (BCU) de Fribourg, repère les ouvrages qui se sont éparpillés aux quatre coins de la planète dans la plus grande discrétion. Puis après avoir arrêté une stratégie avec la task force qui soutient le duo depuis 2015, Jean-Robert Gisler, professeur d’archéologie classique et ancien responsable de la lutte contre le trafic de biens culturels au sein de l’Office fédéral de la police (Fedpol), entre en action. Et prend les contacts – diplomatiques, politiques, policiers, douaniers – qui permettront de ramener les livres, valant pour les plus rares plusieurs centaines de milliers de francs, à Fribourg.

«C’était comme se retrouver face à l’Everest, sans oxygène et pieds nus»
Romain Jurot 

Leur amour du patrimoine et leur passion pour ces somptueux incunables – soit les premiers livres imprimés au XVe siècle avec des caractères mobiles – ont déjà été auréolés par un très grand succès: à la fin de l’année dernière, un exemplaire du Narrenschiff (La Nef des fous en français) a quitté la prestigieuse Bibliothèque du Congrès américain. L’institution le possédait grâce à une donation d’un collectionneur privé, pour les murs de la BCU fribourgeoise. Ce joyau de la littérature mondiale, l’ambassadeur des Etats-Unis en Suisse, Scott Miller, viendra l’admirer lundi et rencontrer une délégation du Conseil d’Etat et des représentants des capucins de Fribourg et de Suisse. A l’aube de cette visite, Romain Jurot et Jean-Robert Gisler détaillent pour La Liberté les dessous passionnants de leur inlassable quête, qu’ils mènent bénévolement avec le soutien de leur équipe, pour l’émouvante beauté et l’importance fondamentale de ces premiers livres imprimés.

Le vol de ces livres n’avait pas fait grand bruit à l’époque. Comment en avez-vous eu vent?

Romain Jurot: Les capucins se sont assez vite rendu compte du vol de 1975. Mais ils se sont sentis démunis face à cet acte et ont préféré ne pas l’ébruiter. En ce qui me concerne, à l’été 2001 je me suis mis à dresser la liste des incunables des capucins déposés à la BCU et j’ai croisé cet inventaire avec une autre liste datant de 1930, conservée à l’Université de Bâle et répertoriant tous les incunables des capucins en Suisse. C’est de cette façon que j’ai vu qu’il en manquait!

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