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Les kaijus, ces «bébêtes étranges» qui nous fascinent

Ils sont partout: au cinéma, à la télé, en BD… Les kaijus, ces monstres japonais emmenés par Godzilla, traversent le temps. Mode d’emploi

Une affiche promotionnelle de Godzilla VS King Ghidorah (1991), peinte par Noriyoshi Ohrai.

18 novembre 2022 à 13:42

Pop culture » La terre qui tremble… Un monstre énorme qui sort des flots… Chaos, cris, destruction… Et on recommence. Depuis 70 ans et les premiers pas écrasants de Godzilla sur le grand écran (1954) les kaijus fascinent. Ces monstres gigantesques – kaiju signifie «bête étrange» en japonais – réveillés par l’homme et ses expérimentations atomiques ont peu à peu colonisé la pop culture. D’abord curiosité cinématographique nippone, les kaijus sont apparus ensuite dans des productions hollywoodiennes, dans les salles d’arcade (Rampage, 1986), dans la bande dessinée, les films d’animation, les lignes de jouets, etc.

En ce début de XXIe siècle, les grosses bébêtes ont plus que jamais le vent dans le dos qu’elles ont généralement épineux. Le manga du moment leur est consacré (lire ci-contre), le cinéma n’en a jamais autant profité (l’adaptation de Rampage, le MonsterVerse de Legendary Pictures et son dantesque Godzilla VS King Kong) et même les séries s’y mettent (Pacific Rim sur Netflix)… Pour y voir plus clair dans le brouillard du kaiju eiga – littéralement «film de monstre» – les éditions Omaké publient Kaiju-Rama, un guide illustré retraçant l’aventure culturelle de ces charmantes bestioles.

Manque de respect

 «Des films de science-fiction complexes, nuancés, souvent drôles et qui tendent un miroir à la société»
John Pratte

«Tout en s’inspirant des films de monstres américains comme King Kong (1933), avec la sortie de Godzilla dans les années 1950 le cinéma japonais fait évoluer le genre en lui offrant du sens et une énorme dose de folie», résume John Pratte, auteur de Kaiju-Rama. «Ce ne sont pas juste des films avec des acteurs en costumes de monstres qui détruisent des villes en carton-pâte, mais des films de science-fiction complexes, nuancés, souvent drôles et qui tendent un miroir à la société. Ce n’est pas pour rien que Godzilla, Mothra (un papillon de nuit géant, ndlr) ou King Ghidorah (une hydre à trois têtes) sont devenues des icônes de la pop culture à travers le monde.»

La bonne idée du livre est de nous raconter l’histoire des kaijus à travers des affiches de films. Des œuvres bigarrées qui captent immédiatement le regard à l’instar de celle de Godzilla VS King Ghidorah (1991), reproduite au centre de cette page. «Depuis la fin des années 1950, les kaiju eiga sont les films japonais les plus exportés à travers le monde, que ce soit aux Etats-Unis, en Europe de l’ouest ou même derrière le rideau de fer pendant la guerre froide, comme en attestent les affiches surréalistes polonaises», illustre John Pratte. Toutefois, cet engouement pour les films japonais ne se fait pas sans mal. «Force est de constater que la plupart des distributeurs en dehors du Japon n’ont que peu de respect pour ces longs-métrages. Ils les sortent dans le désordre et les titres sont mal traduits. Ainsi en Allemagne, la plupart des films de Godzilla sont devenus des films de Frankenstein.»

Un jeu d’enfant

Si Godzilla est l’archétype du kaiju avec à ce jour 36 films au compteur, il est l’arbre qui cache la forêt. Sa popularité a poussé la compagnie productrice Toho à inventer toujours plus de monstres, suivie par d’autres compagnies. Par exemple les studios Daiei avec leur tortue géante – et parfois volante – Gamera (12 films tout de même). Au total près de 80 kaijus ont vu le jour sur pellicule et beaucoup plus si l’on compte les déclinaisons superhéroïques à la Ultraman.

«Le Japon fait évoluer les monstres en leur donnant du sens et une dose de folie» 
John Pratte

Comment expliquer l’incroyable longévité des kaijus qui, à chaque fois, nous mettent en garde contre les dérives scientifiques de notre temps (l’atome, les modifications génétiques, la pollution)? Des études se sont penchées sur ces monstres afin de percer leur mystère. Si elles relèvent bien entendu le rapport de fascination/répulsion que l’homme entretient avec les créatures depuis les mythologies de l’antiquité, la solution est ailleurs. Selon une étude américaine de la Bowling Green State University les kaijus parleraient directement à nos petits cœurs d’enfants. La façon dont les enfants perçoivent le monde est conditionnée par leur petite taille. Ils n’ont qu’un rêve: devenir aussi grands que leurs parents. Ce n’est pas un hasard si les choses de grande taille sont si populaires auprès des petits: les dinosaures, les gratte-ciels, etc. Par leur gigantisme les kaijus s’adressent donc directement à nos sensibilités enfantines.

 

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