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Cinéma. «Voyage au pôle Sud»

Le cinéaste et aventurer français Luc Jacquet (La Marche de l’empereur) revient en Antarctique avec un nouveau long-métrage poétique et personnel qui sublime les paysages épurés du continent blanc.

Le cinéaste et aventurier Luc Jacquet revient en Antarctique. Mais cette fois-ci, le voyage est plus intime. © Xenix Filmdistribution

19 décembre 2023 à 11:00

Luc Jacquet, réalisateur et aventurier, a inscrit son nom dans l’histoire du documentaire avec le triomphe mondial de La Marche de l’empereur en 2005, un phénomène cinématographique qui a marqué le début de ce qu’on pourrait qualifier de manie des pingouins, notamment dans le cinéma d’animation (Happy Feet, Les Rois de la glisse, Les Pingouins de Madagascar).

Presque 20 ans plus tard, Luc Jacquet revient sur le devant de la scène avec Voyage au pôle Sud, également connu sous le titre évocateur de Continent magnétique. Ce documentaire ne suit pas pour autant les traces de son prédécesseur à grand succès La Marche de l’empereur. Il se distingue par son exploration intime et poétique de l’Antarctique.


Pourtant, en 2017 déjà, le cinéaste français avait livré une suite de son plus grand succès avec L'Empereur, un retour sur le continent blanc, certes beau mais avec des qualités cinématographiques moindres. Le public n’a pas suivi. Au lieu de se laisser décourager par cette absence de reconnaissance publique, Luc Jacquet entreprend un nouveau périple cinématographique en Antarctique. Ce choix est assurément une manifestation de la persévérance artistique du cinéaste, démontrant ainsi sa détermination à explorer les profondeurs de son intérêt pour cet endroit du globe.

Etrange suspense

Le voyage cinématographique promis par le titre commence en Patagonie, à l’extrémité sud des Andes. Dans cette région, le réalisateur partage une narration poétique décrivant les phénomènes naturels dans toute leur brutalité et leur beauté saisissante. La Terre de Feu devient ensuite le théâtre d’une mise en scène astucieuse, taquinant les attentes du public en réservant les premières images des pingouins pour une révélation ultérieure. Ce choix délibéré met en lumière la volonté du cinéaste de déconstruire les attentes habituelles associées à son travail, défiant ainsi les conventions. Cet étrange suspense fonctionne, l’entame est réussie.

Alors que ses œuvres précédentes étaient centrées sur des éléments spécifiques tels que les pingouins, la glace et le ciel, Voyage au pôle Sud s’aventure sur un territoire plus personnel, plus intime. Luc Jacquet utilise sa propre narration en voix off pour partager ses pensées, réflexions et observations au cours de son périple. Non sans rappeler des cinéastes aux inclinaisons philosophiques tels que Werner Herzog ou Chris Marker. Luc Jacquet n’atteint pas les mêmes sommets, mais il réussit quand même à maintenir l’intérêt du spectateur en traduisant l’inexprimable à travers ses propres expériences, en communion avec la nature.

Grandeur austère

Les aspects sonore et visuel méritent eux aussi d’être mentionnés. La musique omniprésente de Cyrille Aufort, traversant les genres néoclassiques avec aisance, permet de renforcer les émotions. Le design sonore vient soutenir l’ensemble, même s’il n’est pas toujours des plus subtils (mieux vaut ne pas être allergique au bruit des pas dans la neige ni au vent qui souffle). Les images, capturées avec des drones par un trio de directeurs de la photographie (Christophe Graillot, Jérôme Bouvier et Sarah Del Ben), affichent un noir et blanc très contrasté. Ce choix risqué s’avère visuellement frappant, offrant une perspective unique sur l’Antarctique. Le montage précis complète ces images, permettant à Luc Jacquet de partager visuellement son expérience de l’Antarctique de manière envoûtante.

En résumé, Voyage au pôle Sud transcende les attentes habituelles accolées aux documentaires sur la nature. Le long-métrage va au-delà de la simple exploration des éléments physiques de l’Antarctique. Il tente plutôt de capturer l’essence magnétique de cette région inhospitalière. Une œuvre qui prend les atours d’un appel irrésistible pour le spectateur en quête d’aventure, de mystère et, bien sûr, de pingouins. Luc Jacquet persiste dans sa quête artistique et offre un regard introspectif sur sa propre fascination pour l’Antarctique, un continent qui ne cesse d’exercer une force magnétique sur son esprit créatif.

Ce documentaire ouvre une fenêtre sur l’âme du cinéaste et du continent blanc lui-même. Ce voyage se vit telle une expérience cinématographique immersive qui ne se contente pas de documenter la nature, mais qui explore également les mystères de l’âme humaine face à la grandeur austère de l’Antarctique.

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