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Écrans

Une Daronne haute en couleur

Isabelle Huppert s’amuse avec ce personnage de baronne de la drogue improvisée

Il suffit parfois de quelques accessoires pour s'inventer une nouvelle vie, plus flamboyante.

8 septembre 2020 à 15:34

La Daronne » Bien perspicace qui pourrait repérer Isabelle Huppert cachée derrière ses grosses lunettes hollywoodiennes et planquée sous son foulard de soie… C’est pourtant bien la célèbre actrice française qui incarne ici cette Daronne haute en couleur. Une baronne de la drogue malgré elle qui donne toute sa saveur à cette comédie policière joyeusement amorale, signée Jean-Paul Salomé (Arsène Lupin, Je fais le mort) et adaptée d’un roman à succès d’Hannelore Cayre, plusieurs fois récompensé en 2017.

Patience Portefeux – Isabelle Huppert, donc – est interprète français-arabe pour le compte de la brigade des stups. Une fois ses kilomètres de conversations téléphoniques ineptes entre petits trafiquants traduits, cette veuve taciturne rentre bien sagement dans son immeuble anonyme du quartier populaire de Belleville, à Paris. Elle en sort parfois pour rendre visite à sa mère, sénile, pour laquelle elle se ruine afin de lui offrir un établissement spécialisé de haut standing. Une petite vie monotone qui va basculer lorsqu’elle se rend compte que le petit dealer qu’elle espionne n’est autre que le fils de la gentille infirmière de sa vieille mère. Patience magouille ainsi ses traductions afin d’éviter au jeune homme de se faire pincer avec les kilos de haschisch qu’il fait remonter du Maroc. La traductrice récupère les fameuses valises marocaines et se lance dans le trafic dans les rues de Paris, par opportunité financière, mais aussi par jeu. Il ne faut pas longtemps aux flics pour trouver un surnom à cette mystérieuse grossiste qui inonde le marché: la Daronne.

Anar sur les bords

C’est peu dire qu’Isabelle Huppert est ici utilisée à contre-emploi, elle qui ne s’est que très rarement frottée à la comédie. Une nouvelle corde à son arc qui lui sied très bien. Il faut dire que la comédienne de 67 ans a dû passablement bosser pour ce rôle, en apparence léger mais qui a impliqué un apprentissage phonétique de la langue arabe. Une rigueur qui donne à ce personnage loufoque, amoral et anar sur les bords une profondeur appréciable. Sous d’autres traits, cette Patience Portefeux eût été moins plaisante.

C’est peu dire qu’Isabelle Huppert est ici utilisée à contre-emploi, elle qui ne s’est que très rarement frottée à la comédie.

La comédienne est en outre bien épaulée par des seconds rôles eux aussi en forme: Hippolyte Girardot en amant/policier qui n’y voit que du feu ou Jade-Nagja Nguyen, la voisine chinoise caricaturale qui l’aide à blanchir son argent… Gaiement libertaire et suffisamment inventif dans sa mise en scène pour tenir le spectateur jusqu’au bout, La Daronne est une comédie singulière, inattendue et réussie. Elle aurait toutefois gagné à assumer encore un peu plus son excentricité naturelle.

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