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May December, un face-à-face vénéneux

Le réalisateur Todd Haynes (Carol, Dark Waters) revient avec une dissection des passions factices de la bourgeoisie blanche américaine en s’appuyant sur un fait divers: celui de Mary Kay Letourneau, institutrice ayant eu des relations sexuelles avec un de ses élèves âgé de 12 ans.

Natalie Portman et Juliane Moore: une rencontre toxique. © Elite Film

23 janvier 2024 à 02:05

Entre la lumière aveuglante des rêves américains et les ténèbres des mensonges qui hantent ses personnages, le nouveau film de Todd Haynes, May December, a tout d’un conte moral contemporain où les apparences sont trompeuses. Le réalisateur du baroque Velvet Goldmine et de l’excellent Dark Waters maîtrise l’art subtil de la déconstruction.

Le film se déroule principalement dans une maison idyllique typique d’une Amérique de carte postale, baignée d’une lumière douce qui adoucit les contours et illumine chaque visage, créant une atmosphère envoûtante. Cependant, cette luminosité dissimule des effluves asphyxiants… Car rien n’est simple dans cet univers scintillant.

L’histoire est celle de deux femmes, Elizabeth (Natalie Portman), une actrice de télévision, et Gracie (Juliane Moore), l’inspiration pour son prochain rôle. Gracie, autrefois au cœur d’un scandale médiatique, vit dans une luxueuse maison au bord de l’eau avec son mari Joe (Charles Melton) et leurs enfants. Le film explore les mensonges qui ont tissé leurs vies, dévoilant un passé complexe à travers des détails perturbants.

Todd Haynes, fidèle à son style, jongle avec les conventions de genre tout en explorant les failles entre la réalité et l’apparence

Le scénario joue avec les clichés du «film de femmes» en explorant la vie quotidienne, les espaces domestiques, les dilemmes moraux et politiques, tout en révélant ce qui se cache derrière la tyrannie des fins heureuses made in USA. Le personnage de Gracie est inspiré de Mary Kay Letourneau, une institutrice qui avait défrayé la chronique, enfermée de 1997 à 2004 pour avoir eu des relations sexuelles avec l’un de ses élèves, alors âgé de 12 ans. Un sous-texte qui dénonce la tendance de certains tabloïdes à déguiser des crimes sérieux en romances passionnées.

Chocs humoristiques

Todd Haynes, fidèle à son style, jongle avec les conventions de genre tout en explorant les failles entre la réalité et l’apparence. May December offre des moments de choc humoristique qui défient les attentes du spectateur. L’intrigue se dévoile progressivement alors qu’Elizabeth enquête sur le passé de Gracie, révélant plus d’un paradoxe.

Emmené par Juliane Moore et Natalie Portman, le casting offre des performances convaincantes, chacune apportant nuance et profondeur à son personnage. L’approche du réalisateur crée une dissonance délibérée, laissant le public entre rires et malaise. Todd Haynes s’aventure dans un labyrinthe de miroirs où la vérité semble se dédoubler, amplifiant le mystère et l’ambiguïté. Le film joue avec les émotions du public, l’invitant à remettre en question ses réponses émotionnelles face à une histoire qui évolue constamment entre comédie noire et drame poignant.

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