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Écrans

En tête à tête avec la démence

Dans The Father, Anthony Hopkins nous fait ressentir l’horreur de la maladie d’Alzheimer

Anthony Hopkins est renversant dans le rôle d’un octogénaire atteint de la maladie d’Alzheimer.

26 mai 2021 à 04:01

The Father » Meilleur scénario adapté et meilleure performance d’acteur pour le magnétique Anthony Hopkins (83 ans), aux BAFTA d’abord, puis aux Oscars dernièrement, sans oublier des brassées de nominations tout autour du monde dont le Prix de la meilleure actrice pour Olivia Colman au Zurich Film Festival… Avant même d’avoir ne serait-ce qu’effleuré les toiles helvétiques, The Father jouit d’une aura plus que certaine. Après avoir vu ce film tragique et déroutant qui remue les tripes, on se dit que ces lauriers sont mérités.

Anthony (Anthony Hopkins) est un octogénaire vivant seul à Londres dans un bel appartement. Sa fille n’est jamais loin et vient le voir tous les jours, car le vieil homme est de plus en plus confus. A moins qu’Anthony ne vive carrément en compagnie de sa fille et de son mari, car il ne parvient plus à s’assumer tout seul. Construit à la manière d’un thriller qui déroule la pelote d’une énigme insoluble, The Father se réécrit lui-même au fur et à mesure. Où est la vérité dans ce dédale? La vérité est brutale: Anthony est atteint de la maladie d’Alzheimer ou d’une démence sénile approchante. Le long-métrage raconte le quotidien d’Anthony en adoptant son point de vue: confus, perturbé, plein de trous d’air.

Une mise en scène retorse

Auteur de romans et dramaturge parisien, Florian Zeller passe derrière la caméra non sans s’être au préalable fait les dents sur quelques scénarios. Le néocinéaste a choisi pour son entrée dans le septième art d’adapter à l’écran sa propre pièce de théâtre Le Père, lauréate d’un Molière en 2014. Et c’est le réalisateur lui-même qui est allé convaincre Anthony Hopkins de participer au projet. Ce dernier a bien fait d’accepter puisque ce rôle lui permet de faire étalage de tout son talent.

En adoptant le point de vue du malade, Zeller nous plonge au cœur de la démence, dans ce qu’elle a de plus terrifiant et de plus désorientant. La mise en scène, précise et il faut bien l’écrire, spectaculairement retorse, montre sans fard les effets néfastes d’Alzheimer. Le spectateur qui a déjà été confronté à ce fléau ne pourra que reconnaître la justesse de cette radiographie à la rigueur documentaire. Une simple hésitation, un souvenir qui peine à remonter à la surface et c’est une angoisse indicible qui s’empare du vieillard et de ses proches. Alzheimer ce n’est pas qu’une mémoire qui flanche, c’est la perte de sa personnalité, de ses repères, de sa vie tout entière.

Une performance habitée

La forme de The Father donne à ressentir en raison de sa construction habile mais également grâce à ses interprètes. Anthony Hopkins – le légendaire Dr Hannibal Lecter du Silence des agneaux – livre ici une performance qui restera longtemps dans les mémoires. Le film ne tombe jamais dans le piège du pathos, notamment car son acteur principal sonne juste en tout temps. Sa prestation habitée est tout simplement déchirante. Mais il ne faut pas non plus oublier les seconds rôles, notamment Olivia Colman (La Favorite), elle aussi d’une remarquable sobriété.

Sans faute de style, Florian Zeller réussit haut la main sa première réalisation. Un film touchant et qui embarque son public sans lui mâcher tout le travail. Le parti pris de raconter cette tragédie de l’intérieur est plus que payant.

The Father

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