Logo

Écrans

Cinéma. dans l'intimité du collectif romand qui réinvente le porno

Un documentaire suit un collectif lausannois adepte d’une pornographie positive


Jérémy Rico

Jérémy Rico

11 octobre 2022 à 13:18

Ardente-x-s » Tourner des films pornographiques «éthiques et dissidents», tel est l’objectif du collectif Oil Productions, regroupant des jeunes femmes et des personnes queer, créé en 2018. Le film Ardente-x-s, du réalisateur helvétique Patrick Muroni brosse le portrait de ce groupe d’activistes. Un film sélectionné en compétition nationale au dernier festival du film documentaire nyonnais Visions du Réel et qui, en raison de certaines scènes, est à réserver à un public majeur et averti. Pour autant, ce documentaire ne se veut pas spécialement choquant. Il préfère la voie d’une description positive des activités du groupe et cultive une saine irrévérence.

Nous sommes donc à Lausanne. La caméra sans artifice de Patrick Muroni capte un instantané: la nuit, dans la rue, des jeunes gens âgés d’une vingtaine d’années rigolent et font la fête. Une des filles jette sa bouteille dans une poubelle «parce qu’on n’est pas des punks non plus». Dans la séquence suivante on retrouve la jeune femme derrière le comptoir de la fromagerie dans laquelle elle travaille. Alors qu’elle racle la croûte d’une meule et qu’elle disserte sur le peu de reconnaissance des métiers de service… Lorsque la discussion bascule vers la pornographie, les questions fusent: «Est-ce que mon patron a le droit de me virer s’il l’apprend?»

Confessions générationnelles

«Tous incarnent une réelle résistance au conservatisme suisse. Iels font face au patriarcat, aux inégalités de genre à l’encontre des femmes, des personnes trans, des personnes racisées et des inégalités sociétales de manière générale», résume Patrick Muroni dans sa note d’intention. Car les membres du collectif n’ont pas peur de crier haut et fort qu’ils sont pornographes. Une posture un rien provocatrice qui a surtout pour but de faire changer les mentalités.

Par ce documentaire, le cinéaste suisse n’entend pas bêtement choquer le bourgeois.
 

Pornographiques, certes, mais aussi politiques et artistiques, les films d’Oil Productions tentent de faire souffler un vent de liberté sur un univers du porno souvent jugé sale, macho ou qui exploite les corps. Car selon les activistes, tous les corps dans leur «merveilleuse diversité» ont le droit d’être représentés dans la recherche du plaisir sexuel.

Par ce documentaire, le cinéaste suisse n’entend pas bêtement choquer le bourgeois. Il capte les moments de militantisme (débats publics animés, manifestations dans la rue, etc.) mais aussi et surtout les instants de partage entre les membres. Alors que les scènes explicites sont filmées à la manière d’installations artistiques, refusant d’exploiter les corps avec lubricité, c’est dans les moments intimes où les protagonistes se livrent que la caméra se fait peut-être la plus indiscrète. En se faisant oublier, celle-ci attrape au vol les espoirs de changement, les aspirations profondes et les confessions d’une génération en rupture avec le monde légué par leurs parents.

Une démarche empathique qui prouve que ces jeunes ne sont ni des dingues ni des freaks mais juste des personnes en quête d’un idéal d’amour. Un film étonnant à découvrir ce jeudi 13 octobre à Fribourg, au Cinemotion Rex (20h30). La projection sera suivie d’une discussion avec l’équipe du film.

Ardente-x-s

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus