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Chroniques sportives

Chronique. A quand la fondue à l’Unesco?

Être accro à la fondue, c'est possible! Notre chroniqueur se confie sur sa cocasse et goûteuse addiction.

Dire que cette splendeur fondue et fondante n’est toujours pas inscrite au patrimoine mondial… © Vincent Murith-archives

10 novembre 2023 à 18:10

Elle rend le dimanche soir plus doux et rassemble les gens. Elle est un réchaud pour le moral pour mieux passer l’hiver. Une fondue, c’est comme un bain moussant après une journée à la neige ou un thé à la cannelle au marché de Noël.

C’est d’ailleurs Noël à chaque fois que le fromage fond. On coupe les morceaux de pain comme on emballe des cadeaux. On chantonne pendant qu’on touille en voyant Tino Rossi sourire dans la hotte: «Mon beau vacherin, roi des Creusets, que j’aime ta pâte mi-dure.» On cisaille quelques gousses car une fondue sans ail, c’est comme un kebab sans sauce blanche ou un acra sans morue. Ça se fait, mais il manque quelque chose.

Et quand on met le premier morceau dans sa bouche, le monde alentour s’efface, les yeux se ferment, le palais exulte. Une immersion dans les ferments lactiques, une apnée fromagère. On les rouvre en voyant ceux des autres convives scintiller; on est tous sur la même longueur d’onde, on surfe sur la même meule puis on replonge sa fourchette. La jubilation est immédiate, l’addiction volontaire.

Des caquelons me narguent en me tendant leur manche

Lorsque je suis en voyage sans accès à un caquelon, les premiers tremblements apparaissent après une semaine. Trois jours plus tard, j’ai les symptômes d’un cocaïnomane en rupture de poudre puis je suis précipité dans un abysse. Chez le plongeur en mer, l’excès d’azote pose problème. Chez moi, c’est le manque de fondue!

Pris d’hallucinations, je vois des dés de gruyère tournoyer devant ma bouche écumante, des caquelons me narguent en me tendant leur manche, des seringues de cholestérol assaillent mes veines. Là je serais capable de partager une Gerber en boîte avec quelqu’un qui a des aphtes plein les muqueuses ou qui arborerait fièrement son triple herpès labial. Au paroxysme de la crise, on m’enfile généralement une lignée d’Apéricubes dans le gosier et à chaque fois je refais surface, mais juste juste. A la raclette!

Vraiment incurable

Pour mieux gérer les sevrages, je participe aux réunions des «Fondus de fromage anonymes» où on cherche à vous en dégoûter. On vous fait asseoir nu sur un réchaud allumé en vous plantant des fourchettes dans les rotules, on vous force à avaler un mélange edam-gouda avec du jus de goyave au lieu du vin blanc en remplaçant le pain par des marshmallows saveur choux de Bruxelles. Mais manifestement, je suis incurable.

Œuvre d’art culinaire, la fondue devrait figurer tout en haut de la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco et en première page du Croqu’menus qu’on distribue au CO. Sa texture moelleuse contente autant les bambins qui n’ont pas encore de dents que les anciens qui n’en ont plus. Et procurant tant de bien-être, il serait légitime qu’un kilo de fondue, par personne et par mois, soit remboursé par les caisses-maladie. Car privez-en une personne durablement, vous la rendrez souffreteuse et mor… fondue!

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