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Société

Matthieu Gafsou souligne dans son art les douleurs de la Terre

Au Musée d’art de Pully, Matthieu Gafsou présente son travail, dont sa dernière série Vivants, sur la dégradation de l’environnement.


16 septembre 2022 à 15:59

Photographie » Il assure aimer le rose, même s’il pense mal le porter. Sur ses photos, ce n’est assurément pas la première couleur qui saute aux yeux… Les gris d’un ciel menaçant (un ciel écossais en vérité) ou d’un Léman d’acier; les noirs de la nuit ou d’une planète qui déraille semblent plutôt la signature naturelle de Matthieu Gafsou. Il y a bien ces eaux rouges, dans sa dernière série Vivants, qui happent le regard. Mais elles font office d’alarme. Le carmin – des jus de betterave et de myrtille jetés par le photographe dans la rivière – soulignent les douleurs de la Terre blessée par l’homme. Depuis jeudi, le Musée d’art de Pully présente Le voile du réel, une vaste et très belle exposition consacrée au photographe vaudois, tout à la fois artiste et reporter engagé.

Et même s’il semble un peu tôt, à 40 ans, pour parler de rétrospective, c’est exactement de cela qu’il s’agit. Dans le musée pulliéran, on peut apprécier la déjà très grande richesse de l’œuvre du photographe. De ses images de son travail de diplôme, Surfaces (2006-2008), lorsqu’il étudiait à l’Ecole supérieure d’arts appliqués de Vevey, jusqu’à ses clichés les plus récents, Matthieu Gafsou s’est, pour l’occasion, replongé dans ses archives. Avec plus ou moins de joie: «Evidemment aujourd’hui, il y a des images que je ne ferais plus. Au début, on reproduit forcément les maîtres (parmi lesquels il cite très rapidement Martin Parr, ndlr) et l’on se trouve sur un chemin très balisé. Avec les années et l’expérience, on peut se distancier et chercher son propre langage», explique-t-il.

«C’est un choc entre le dedans et le dehors » 
Matthieu Gafsou

Sa narration personnelle, le quadragénaire l’a assurément trouvée. Elle se déploie toujours sur plusieurs niveaux, comme pour nous rappeler que le monde n’est pas ce qu’il a l’air d’être et que rien n’est jamais noir ou blanc. Ainsi l’une des premières photos de l’exposition, prise en Tunisie, le pays d’origine de son père, montre une immense paroi rocheuse dans laquelle est taillée une imposante tête évoquant un sphinx. Il s’agit en fait d’un ajout, d’un simulacre. En s’approchant, on verra un liseré marquant la frontière entre la vraie pierre et le carton-pâte. Il y a aussi le kiosque du parc de Milan, à Lausanne, orné d’une jungle enfantine. Et derrière, en noir et blanc, les arbres chargés de neige. «C’est un choc entre le dedans et le dehors. Cette photo est très frontale, une sensation amplifiée par le fait que je l’ai prise à la chambre, d’où son aspect très plat qui lui donne une sensation mystérieuse.»

Tripes en loopings

Dépasser la première impression, s’engager dans des séries au long cours, s’immerger, Matthieu Gafsou n’a jamais eu peur de le faire. En 2011-2012, il signe l’Enquête photographique du canton de Fribourg sur l’Eglise catholique, intitulée Sacré. Des images très flashées qui leur confèrent de la froideur et parfois même une certaine brutalité. Puis c’est dans le milieu de la drogue à Lausanne que le photographe se plonge (Only God can judge me, 2012-2014). D’une fleur de pavot à la beauté picturale, dont on fait de l’héroïne, aux portraits de personnes toxicomanes, remuants de dignité, Matthieu Gafsou nous bouscule. Les tripes du visiteur font des loopings entre les clichés documentaires – les seringues, les matelas sales – et des photos pleines de poésie et de délicatesse – les lieux nocturnes où se retrouvent les drogués, dont le parc de Milan illuminé cette fois de façon quasi fantastique.

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