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Évasion

Varsovie, toujours debout

La capitale polonaise, ravagée par la Seconde Guerre mondiale, est une ville en partie reconstruite «à l’identique». Son architecture raconte en filigrane l’histoire douloureuse de toute l’Europe


19 mars 2019 à 17:15

Europe » Est-ce un bâtiment du XVIIIe siècle ou une maison recréée à l’identique il y a près de 70 ans? Cette question taraude le touriste averti tout au long de sa visite de Varsovie. S’il ne sait pas que la ville a été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale – particulièrement le ghetto qui a été rasé – il ne remarquera peut-être pas que la capitale polonaise n’a que peu de bâtiments originaux. Les immeubles épargnés par les bombardements sont souvent des maisons cossues choisies par les nazis pour leurs quartiers. Passée ensuite sous le giron communiste, Varsovie dénombre des bâtiments aux angles tranchants et aux silhouettes robustes (la place Konstytucji est pensée pour les défilés de chars). Puis ce sont les gratte-ciel modernes qui ont poussé en grappes. Son architecture raconte en filigrane l’histoire douloureuse de toute l’Europe.

Première halte dans la Vieille-Ville, inscrite à l’Unesco, en reconnaissance à sa reconstruction très fidèle. Le château royal, édifice agrandi au fil des siècles et patchwork de styles architecturaux, accueille le visiteur. Une seule pierre de la façade orientale est d’époque. On l’identifiera facilement: plus foncée, elle se trouve à droite de la porte. Le château, miné par les nazis, a explosé en 1944. Mais il avait déjà été endommagé auparavant. En mémoire des premières bombes qui ont touché la tour et arrêté son horloge, chaque jour à 11h15, un trompettiste joue l’hymne de Varsovie. En face, le roi Sigismond III, le souverain préféré des Varsoviens, surveille de sa colonne le château, où il a dû déménager après avoir mis le feu à sa demeure à cause d’expériences scientifiques mal maîtrisées…

Toute proche, la cathédrale Saint-Jean n’a plus qu’une chapelle intérieure originelle. Le reste de l’édifice a été reconstruit en gardant les volumes et en insérant dans un mur une chenille d’un tank allemand…

Cloche porte-bonheur

Sur la place derrière la cathédrale, on ne s’étonnera pas de voir des gens sautiller autour d’une cloche en airain. Selon la croyance, il suffit de faire un vœu en la touchant de la main gauche tout en fermant les yeux, puis de les rouvrir et de tourner autour de cette œuvre du XVIIe siècle dans le sens des aiguilles d’une montre, à cloche-pied, sur la jambe gauche.

Quelques pas plus loin, on débouche sur la place du Marché, dont la fontaine centrale sert l’hiver de piste de patinage. Elle est cernée de maisons aux façades colorées et délicatement peintes. Là aussi, un seul côté de la place a traversé les siècles.

En suivant la rue Krakowskie Przedmiescie, surnommée les «Champs-Elysées varsoviens», on pourra s’approcher de l’immanquable palais de la Culture et des Sciences, imposante tour de style communiste. Ce «cadeau» de Staline à la nation polonaise abrite aujourd’hui des salles de cinéma, quatre théâtres, une piscine et des salles de sport. Entouré d’immeubles modernes, dont un building en forme de voile de Daniel Liebeskind, un architecte d’origine polonaise, ce gratte-ciel massif offre une vue imprenable sur toute Varsovie.

L’histoire juive

L’un de ses murs marque le début du ghetto juif, qui était le plus grand d’Europe et dont il ne reste quasiment rien. Dans cette partie de la ville ont vécu jusqu’à 380’000 personnes, soit un tiers de la population varsovienne. Et beaucoup y sont morts.

En marchant dans les rues, on observe parfois que les maisons sont surélevées: dans l’urgence, les autorités communistes d’après-guerre ont érigé les immeubles directement sur les ruines du ghetto. Bouleversant. Pour comprendre la vie dans cette prison à ciel ouvert, la visite du musée d’histoire des juifs polonais, Polin, est essentielle. Cette vaste institution raconte 1000 ans de présence juive dans le pays, mettant en lumière une richesse cuturelle remarquable.


ŁódŹ, le Hollywood Polonais à visiter

«Mais, c’est Colargol», s’écriera le visiteur du Musée de la cinématographie de Łódź. Le petit ours de textile, héros de la série télévisée d’animation franco-polonaise diffusée pour la première fois dans les années 70, trône en effet dans une de ses vitrines. Plus intéressant encore, le touriste pourra se glisser dans le décor du film d’animation The Flying Machine, dédié à Chopin, se prenant ainsi pour un géant dans les rues de Paris. Dans ce musée – on nous promet pour bientôt des panneaux en anglais – est racontée l’histoire du septième art, avec beaucoup de matériel ancien et un focus sur les plus célèbres noms polonais de la discipline, comme Wajda ou Polanski. Łódź (prononcez «woudj»), qui est situé à environ 1h30 en train de Varsovie, est le Hollywood polonais. Sa magnifique gare moderne enserre l’ancienne station, la métamorphosant en décor, ce qui donne le ton de cette visite où le vieux et le nouveau se côtoient, où le flambant neuf et le délabré se fréquentent. On appréciera de marcher sur le Walk of Fame, soit l’allée des stars, d’admirer les œuvres de street art et le Passage de la Rose aux mille et un miroirs. A voir également la Manufaktura, une ancienne fabrique de textile reconvertie en centre commercial et récréatif, et le Off, un lieu plus alternatif où découvrir des créateurs polonais et profiter des bars. TB


Les néons à plein tube

Petit mais ludique, le Musée des néons situé dans le quartier populaire de Praga vaut le détour.

Un éléphant la trompe en l’air, une sirène armée d’une épée et d’un bouclier (c’est le symbole de Varsovie) qui était autrefois accrochée à une bibliothèque publique ou une enseigne de cinéma tout en sobriété: les tubes lumineux présentés au Musée des néons s’admirent sans modération. Ce sont plus de 200 pièces de l’époque communiste qui ont trouvé refuge dans ce lieu privé visant à préserver, réparer et exposer des reliques luminescentes. On furète dans les allées, on reconnaît parfois une enseigne vue en ville, on découvre les écritures tout à fait vintage. Si malheureusement tous ne sont pas allumés et très peu sont accompagnés de mise en contexte, ces néons provoquent un moment de fraîcheur et d’amusement bienvenus.

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