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Suisse

Un trou noir à 20 milliards dans les retraites

Des milliards de francs de la prévoyance professionnelle ont disparu des radars. L’historien fribourgeois, Pietro Boschetti, mène l’enquête dans son dernier livre L’Affaire du siècle.

La loi sur la prévoyance professionnelle ne contraignait pas les firmes d’assurance à tenir une comptabilité séparée. © Keystone

11 novembre 2023 à 14:50

Temps de lecture : 1 min

Assurances sociales » Pas besoin de consacrer beaucoup de temps pour comprendre comment le lobbying fonctionne sous la Coupole fédérale. Sur un peu plus de cent pages, L’Affaire du siècle de Pietro Boschetti illustre parfaitement l’intrusion du secteur privé dans l’élaboration des lois. Ou plutôt la pression des entreprises pour ne pas légiférer.

Dans son ouvrage publié récemment, l’historien fribourgeois met le doigt sur un vide juridique entourant les retraites. Ce trou noir a permis aux sociétés d’assurance sur la vie d’engranger près de 20 milliards de francs en l’espace de vingt ans. Rembobinons. Nous sommes en 1985, année où le deuxième pilier devient obligatoire pour la majorité des employés. Les assureurs-vie ont participé à la mise en place de ce régime sentant les bonnes affaires. Dès l’entrée en vigueur de la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP), ils proposent leurs services aux grandes sociétés et PME.

Il faut dire que le terrain a déjà été préparé. Le journaliste à la retraite prend pour exemple le procès-verbal du 7 décembre 1972 de la séance des directeurs de compagnies d’assurance: «Dès l’instauration du système des trois piliers dans les années septante, ils se frottent les mains et évoquent une guerre gagnée».

Un montant jamais confirmé

La première entourloupe survient dès 1985. «La loi ne contraint pas les firmes à tenir une comptabilité séparée entre les avoirs de vieillesse des salariés et ceux en provenance d’autres activités. Il faudra attendre 2004 pour que la législation change», explique le journaliste aujourd’hui à la retraite. Or les groupes réalisent de juteux profits, en plaçant l’argent des retraites sur les marchés. Ce sont ces fameux 20 milliards, une estimation puisque ce montant n’a jamais été confirmé ni infirmé par les assureurs. Le professeur de droit qui s’est penché sur le sujet n’est pas parvenu à remonter le fil des dizaines de milliers de transactions boursières.

«C’est le deuxième scandale de l’histoire: nous ne savons pas où sont passés ces excédents. Ils n’ont pas été redistribués aux assurés des caisses de pension gérées par les assureurs-vie. Ce problème d’excédents, qui concerne la période de 1985 à 2002, était un véritable continent sans visage ni transparence», dénonce Pietro Boschetti.

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