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Suisse

Le Hamas sera interdit en Suisse

Après al-Qaïda et l’Etat islamique, le Conseil fédéral veut bannir l’organisation palestinienne

Ignazio Cassis et Elisabeth Baume-Schneider ont défendu ensemble devant les médias l’interdiction du Hamas. © Keystone

22 novembre 2023 à 22:30

Temps de lecture : 1 min

Diplomatie » Le Conseil fédéral en avait déjà manifesté l’intention quatre jours seulement après les attaques terroristes perpétrées par le Hamas contre des civils israéliens. Et mercredi, il a décidé d’interdire l’organisation palestinienne en Suisse en passant par une loi fédérale «ad hoc». Une décision prise «après une discussion riche et enrichissante», a reconnu la ministre Elisabeth Baume-Schneider. On peut traduire que le Conseil fédéral était divisé sur la question. Sa décision était attendue la semaine dernière. Elle a été repoussée discrètement dans le contexte de la visite du président français Emmanuel Macron.

La surprise est surtout venue hier du renoncement à suivre la procédure urgente, si souvent utilisée dans la législature qui se termine (Covid, Ukraine, énergie, Credit Suisse). «Nous sommes attentifs à ne pas abuser du droit d’urgence, parce qu’on sait que le parlement y est très sensible du point de vue démocratique», a justifié la conseillère fédérale. Or les conditions n’étaient pas remplies pour une procédure urgente, selon elle. La mesure se veut avant tout «préventive», selon la socialiste jurassienne. Il s’agit d’éviter que la Suisse devienne «une plate-forme de financement du Hamas» et de faciliter d’éventuelles procédures pénales en Suisse.

Un an au minimum

Formellement, le Conseil fédéral va tricoter un projet de loi d’ici à fin février, qui sera soumis ensuite à consultation. Libre ensuite au parlement, s’il en a envie, d’accélérer la procédure par un examen conjoint par les deux Chambres. Le tout devrait néanmoins prendre un an environ, avec une situation appelée à évoluer. Elle a déjà beaucoup évolué en un mois. Aujourd’hui, c’est la situation humanitaire dans la bande de Gaza qui interpelle en premier lieu.

Pour prendre cette décision, le Conseil fédéral a fait «une pesée d’intérêts», a expliqué Elisabeth Baume-Schneider. La balance a penché du côté des intérêts de la sécurité intérieure et des impératifs de la lutte contre le financement du terrorisme. A ses yeux, «l’interdiction est une réponse appropriée aux actes terroristes du 7 octobre et aux changements notoires qu’ils ont provoqués concernant la situation sécuritaire aussi bien au Proche-Orient que dans notre pays». Mais la ministre de la Justice a reconnu que cela «pourrait affecter la marge de manœuvre de la politique étrangère de la Suisse».

De même pour son collègue Ignazio Cassis, c’est «la gravité des faits» qui justifie l’interdiction du Hamas en Suisse. Le ministre a rappelé les précédents que constituent l’interdiction d’al-Qaïda et celle de l’Etat islamique. Sauf que celles-ci reposaient sur des résolutions de l’ONU, ce qui n’est pas le cas cette fois-ci. «Cela équivaut à reconnaître que se baser sur l’ONU aujourd’hui n’est plus suffisant», admet le libéral-radical tessinois. «Le problème, c’est qu’avec la guerre en Ukraine, on a dû constater que le Conseil de sécurité de l’ONU n’est plus en mesure de se déterminer de manière claire sur ce genre de guerres, puisque le monde est devenu multipolaire, fragmenté. Et les membres du Conseil de sécurité – c’est le cas de la Russie – sont en guerre. » Des propos qui détonnent venant d’un pays qui siège pour la première fois au sein de cet organe…

«Boîte de Pandore»

Président du groupe parlementaire Suisse-Palestine, Carlo Sommaruga s’opposera au projet de loi. «Cette interdiction ne contribuera en rien à la paix. Au contraire, elle entrave le rôle que pourrait jouer la Suisse comme médiatrice dans un processus de paix.» Le sénateur genevois rappelle «tous les processus de paix qui ont dû être négociés avec des organisations qualifiées par leurs gouvernements de terroristes». Il cite comme exemples les FARC en Colombie ou l’ANC en Afrique du Sud.

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