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Sports motorisés

«Notre Valentino Rossi à nous»

En 20 ans sur le circuit, Thomas Lüthi a marqué toute une génération et aidé à populariser son sport


14 novembre 2021 à 22:33

Motocyclisme » Valence. Là où il a réalisé son plus grand fait d’armes, il y a 16 ans. Pour la dernière fois dimanche, Thomas Lüthi a coupé la ligne et son moteur (12e place finale). Pas le cordon invisible qui le relie aux deux roues. Désormais pilote retraité, le Bernois de 35 ans a pris congé du paddock après 318 départs en Grand Prix. Mais déjà, les retrouvailles sont agendées. Elles auront lieu dans quelques jours, toujours en Espagne, aux essais de Jerez de la Frontera. Sur un circuit qui s’est toujours refusé à lui, l’homme aux 17 victoires et 65 podiums enfilera son costume de directeur sportif de Prüstel GP, l’équipe de Moto 3 dans laquelle évoluait son ami et protégé, Jason Dupasquier, jusqu’à l’accident tragique du mois de juin.

«Même si cette reconversion est entourée d’un gros point d’interrogation pour lui, car il n’est jamais évident de tout arrêter du jour au lendemain, je l’imagine totalement s’épanouir dans ses nouvelles fonctions. Au fil des années, Thomas est devenu un vrai businessman. Une page se tourne dans tous les cas. Comme Valentino Rossi, c’est un pilote qu’on aimerait voir rouler éternellement», souffle Robin Mülhauser. Le Fribourgeois est de ceux qui ont croché à l’univers de la moto en 2005, année du titre mondial de Thomas Lüthi chez les 125 cm3. «Voir un petit Suisse s’inviter dans la cour des grands avait marqué toute une génération», appuie Robin Mülhauser, qui fut par la suite son coéquipier.

Persévérant et borné

«Le jour où je l’ai rencontré, en 2014 pour des essais, le trophée qu’il venait de remporter à Valence sentait encore le champagne. J’étais impressionné, mais à aucun moment il ne m’a pris de haut. Tom est un mec génial et un ami sur lequel on peut toujours compter.» Double vice-champion du monde de Moto 2 au guidon d’une Kalex (2016 et 2017), l’Emmentalois de poche a conclu 9 de ses 20 saisons à l’une des cinq premières places du classement général. Une longévité aux avant-postes qui lui a finalement permis de goûter à la catégorie reine, 21 ans après Eskil Suter, dernier Suisse à avoir connu cet honneur (1997). L’aventure en Moto GP tournera au vinaigre, la machine et l’entourage ne répondant pas aux attentes du Bernois. «De retour en Moto 2 l’année suivante, il a directement rebondi en luttant pour le titre mondial. Une preuve supplémentaire de son incroyable force mentale. A son âge, d’autres se seraient écroulés», estime Bernard Jonzier, ancien commentateur à la RTS et voix indissociable des premiers succès de «Tom-Tom».

«Tom est un mec génial et un ami sur lequel on peut toujours compter»

Robin Mülhauser

Persévérant. L’adjectif lui colle à la peau comme une combinaison en cuir. «Thomas Lüthi, c’est un caractère de cochon, mais dans le bon sens du terme. Il est borné et veut toujours gagner», encense Robin Mülhauser, qui a pu s’inspirer du «meilleur pilote du pays» durant deux saisons: «Son pilotage était épuré et fluide. Il m’impressionnait par sa capacité à réduire sa phase neutre au maximum. Ce qu’il lui manquait peut-être, c’était un peu d’agressivité…» Thomas Lüthi, un artiste sur deux roues comme l’est Roger Federer sur un court ou Simon Ammann dans les airs. A leur échelle et à leur façon, les trois ont conquis le cœur du public helvétique au début des années 2000. «Les parallèles sont nombreux entre Simon et Thomas, note Bernard Jonzier. Même coupe de cheveux, mêmes lunettes cerclées à la Harry Potter, même simplicité, ils avaient une bonne bouille d’ado qui donnait envie de les protéger.»

Place au second Tom

Deux héros «à la suisse» labellisés bio. «Thomas aussi venait de la campagne. D’ailleurs, il y vit toujours. Quand il a commencé à être connu, les reportages à la ferme familiale de Linden se multipliaient. Je me rappelle que Blick voulait le faire poser en train de traire les vaches. Il avait refusé, car il ne le faisait jamais. Pas question de jouer avec l’image du petit agriculteur qui a percé, il respectait trop le travail de ses parents», raconte l’ex-journaliste «chaud bouillant», qui a vu ses pulsations et les taux d’audience monter en même temps que la cote de son chouchou. «C’est certainement la personne qui m’a fait le plus pleurer dans ma vie, rigole le Vaudois. Le public suisse étant un brin chauvin, Thomas a rendu populaire le sport moto. C’est notre Valentino Rossi à nous! Même s’il n’a pas eu les résultats qu’il espérait ces deux dernières années, il y avait toujours des drapeaux suisses aux abords des circuits.»

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