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Religions

Le professeur François-Xavier Amherdt part à la retraite sans perdre l'espérance

A l’heure de sa retraite académique, le professeur François-Xavier Amherdt se veut porteur d’espérance

Après seize ans de ministère à l'Université de Fribourg, le professeur de théologie François-Xavier Amherdt s'apprête à retourner dans le diocèse de Sion, où il deviendra curé de Savièse.

6 mai 2023 à 00:34

Leçon d’adieu » Face aux crises multiples de l’Eglise, le professeur de théologie François-Xavier Amherdt ne perd pas espoir. Pour lui, l’Eglise catholique se relèvera de ses maux à partir de petites communautés ecclésiales vivantes. A l’heure de quitter l’Université de Fribourg pour raison d’âge (66 ans), et avant de reprendre comme curé la grande paroisse de Savièse, dans le diocèse de Sion, le médiatique abbé valaisan, également connu comme arbitre de football et musicien, nous livre quelques réflexions sur son ministère académique et sur les perspectives de la pastorale en l’Eglise. Rencontre.

Vous arrivez au terme de seize ans de professorat. Quel regard portez-vous sur toutes ces années?

François-Xavier Amherdt: J’ai été comblé tant par les étudiants que par mes collègues enseignants. J’ai accompagné un nombre incalculable de jeunes dans leurs études et thèses de doctorat. A travers eux, j’ai beaucoup appris.

«Je rêve de communautés de base dans chaque village»
François-Xavier Amherdt

La Faculté de théologie de Fribourg est caractérisée par son bilinguisme et son internationalité. C’est une richesse exceptionnelle que de pouvoir bénéficier de deux cultures, deux «poumons», en collaboration avec mon confrère alémanique Salvatore Loiero. Mais aussi de pouvoir côtoyer cinquante nationalités. C’est comme une Eglise en miniature!

La place ménagée à ma chaire de théologie pastorale, pédagogie religieuse et homilétique (prédication) a été magnifique. J’ai pu observer une prise de conscience de l’importance de la pratique de la vie de l’Eglise, en ces périodes de crise et d’indifférence. La faculté est heureusement restée stable, avec environ 400 étudiants, en particulier grâce à l’apport d’étudiants étrangers issus de congrégations religieuses. Aujourd’hui, plus d’un tiers sont des femmes.

Avez-vous développé des collaborations avec d’autres universités?

«J’ai pu observer une prise de conscience de l’importance de la pratique de la vie de l’Eglise, en ces périodes de crise et d’indifférence»
François-Xavier Amherdt

Oui, par exemple avec les professeurs de théologie pratique francophone autour de la revue internationale de catéchèse et pastorale Lumen Vitae, dont je suis le directeur adjoint. Cela nous a assuré un réseau en Belgique, France, Italie et au Canada. Des cotutelles de doctorants ont été mises sur pied, entre autres avec Paris et Madagascar. Nous avons aussi développé des collaborations avec les facultés germanophones de Coire et de Lucerne, qui ont débouché sur des séminaires communs et des publications. Je codirige en outre une collection intitulée Théologie africaine. D’un point de vue œcuménique, nous partageons un laboratoire de théologie pratique avec Elisabeth Parmentier, professeure à Genève, et Olivier Bauer, à Lausanne. Ce semestre, j’ai même été invité à donner un cours de théologie catholique à Genève. Nous avons un projet de voie d’étude interreligieuse, très attendue des étudiants. L’enjeu est théologique, mais aussi sociétal, par exemple autour de l’écologie ou de l’engagement pour la paix et les droits de l’homme. Nous avons aussi beaucoup de liens avec les étudiants orthodoxes de Chambésy, qui accomplissent une partie de leurs études à Fribourg.

Votre spécialité, c’est la prédication. Comment évangéliser quand l’Eglise est sans cesse entachée par de graves affaires?

Je me situe en toute humilité dans une Eglise fragile, mais je me sens appelé à être porte-parole d’espérance. C’est ce que j’ai fait auprès des étudiants, très marqués par toutes ces crises. Il a fallu les soutenir, les accompagner, les encourager. Les étudiants aujourd’hui sont très sensibles à l’enracinement spirituel de toute la vie ecclésiale et pastorale. S’il n’y avait qu’une thèse à garder de mon enseignement, c’est la nécessité d’ancrer notre vie ecclésiale dans la force de l’Esprit saint. Ma leçon d’adieu parlera d’ailleurs du souffle en catéchèse et pastorale.

L’avenir, vous le voyez dans les petites fraternités…

«Tous les agents pastoraux, catéchistes et parents sont appelés à être disciples missionnaires»
François-Xavier Amherdt

Ma thèse, pour créer des liens, est de bâtir nos communautés paroissiales autour de petites cellules ecclésiales. Dans ces cellules à taille humaine, on se connaît, on prie ensemble, on vit la fraternité, on s’engage pour la justice. De telles «communautés de base» existent déjà dans de nombreux diocèses, notamment dans l’hémisphère Sud. En Europe occidentale, on n’en est qu’aux balbutiements. Dans la grande commune de Savièse, forte de 8000 catholiques, je rêve de communautés de base dans chaque village et hameau, et que la paroisse soit l’occasion de les rassembler. Comme le dit le pape François, la paroisse doit être «une communauté de communautés». L’Eglise catholique est à un carrefour, dans la crise qu’elle traverse. La voie à explorer, à mon sens, c’est une véritable décentralisation. Avoir une diversité dans l’unité. Mais Rome est-elle prête à vivre vraiment la synodalité? L’enjeu est là. Veut-on faire de l’Esprit saint celui qui guide l’Eglise ou veut-on maintenir le cadre d’une structure quelque peu sclérosée?

Votre leçon d’adieu évoquera la spiritualité dans la perspective d’un compagnonnage…

Dans notre temps de crise, chaque personne mérite d’être écoutée et accompagnée. Ce compagnonnage n’est pas réservé aux prêtres. Tous les agents pastoraux, catéchistes et parents sont appelés à être disciples missionnaires. Fondamentalement, il s’agit de passer d’un christianisme de consommation à un christianisme de participation, d’un christianisme de maintenance à un christianisme de conversion. Il est temps que l’Eglise catholique se convertisse.

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