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Analyse et graphiques. pourquoi les films sont-ils toujours plus longs?

Les films semblent de plus en plus longs. C’est ce que ressentent les spectateurs et ce que démontrent les chiffres. Décryptage

Bored people fall asleep in a theaterScott Griessel/Creatista/2011 Scott Griessel/Creatista

31 août 2023 à 19:20

Cinéma » Cela n’a échappé à personne, cet été au cinéma, il fallait choisir entre Barbie et Oppenheimer. Deux blockbusters sortis le même jour. Au moment d’acheter son ticket, le cinéphile jette forcément un coup d’œil à la durée du film et la différence saute aux yeux. Avec ses 3 h Oppenheimer, le biopic signé Christopher Nolan, en a retenu plus d’un. Barbie, délire féministe de Greta Gerwig, clôt les débats en 1 h 54, c’est plus digeste, même si c’est déjà long pour une comédie. Et combien de parents ont-ils été surpris par La Petite Sirène de Disney avec ses 2 h 15 difficiles à encaisser pour les plus jeunes? Le public le ressent, les chiffres le prouvent: les longs-métrages s’allongent inexorablement. Pourquoi? Eléments de réponse.

«Les films très longs sont souvent réalisés par des auteurs qui peuvent se permettre d’imposer de telles durées»
Xavier Pattaroni

Il est loin le temps où les films duraient 1 h 30 et où les salles programmaient trois séances à la suite. Certes, les blockbusters extralarges ont toujours existé: Autant en emporte le vent, en 1939, durait 3 h 58, sans oublier les péplums à la Ben-Hur (1959, 3 h 38). Mais ce qui était l’exception devient la règle. On ne compte plus les films à grand spectacle qui explosent le compteur. Le dernier Avatar de James Cameron? 3 h 12. Babylon de Damien Chazelle? 3 h 08. The Batman? 2 h 56. Et le phénomène touche aussi les productions des plateformes de streaming. The Irishman (2019) de Martin Scorsese sur Netflix dure 3 h 29. Même le cinéma d’auteur n’échappe pas à la tendance: l’année passée, Pacifiction d’Albert Serra nous enivrait durant 2 h 46. A l’heure où les contenus audiovisuels se multiplient et où les réseaux sociaux imposent leurs formats hypercourts, cette évolution cinématographique interpelle.

Se démarquer de la TV

Selon les statistiques de Box Office Mojo, filiale de la base de données de référence Internet Movie Database (IMDb), en 2021 les films duraient en moyenne 9 minutes de plus qu’en 2011, 14 minutes de plus qu’en 1991 et 21 minutes de plus qu’en 1981. Des chiffres basés sur les 10 films les plus vus en salles aux Etats-Unis chaque année. La première raison de cette tendance est sans doute la volonté des productions cinématographiques de se démarquer des productions télévisuelles. «Les films très longs sont souvent réalisés par des auteurs qui peuvent se permettre d’imposer de telles durées, à l’instar de James Cameron, Peter Jackson ou Christopher Nolan. Il y a une volonté de montrer au public un spectacle grandiose», analyse Xavier Pattaroni, programmateur des salles Cinemotion, à Fribourg, à Bulle et à Payerne. Et peut-être aussi le besoin de justifier le prix du ticket d’entrée? «Je ne pense pas. Sinon les films seraient facturés à la minute», ajoute le professionnel qui estime qu’un bon film de longue durée fera plus d’entrées que deux films courts qui ne trouvent pas leur public. «Pour les cinémas, la diffusion de films très longs n’est pas forcément synonyme de perte d’argent. Mais il est certain que cela limite le nombre de séances. Il y a donc une perte au niveau de la capacité d’accueil et aussi une péjoration de la diversité.»

Les films indépendants et le cinéma d’auteur eux aussi prennent leurs aises

Une autre explication de l’allongement des longs-métrages est sans doute le changement des habitudes de consommation du public. A l’époque où les chaînes de télévision françaises finançaient des films pour les diffuser ensuite en prime time, ceux-ci ne devaient vraiment pas être longs. Aujourd’hui encore, TF1 contourne le problème en accélérant les génériques quand il ne s’agit pas des films eux-mêmes (la diffusion vitesse grand V des films Harry Potter durant le confinement avait dégoûté plus d’un cinéphile). Reste que le public a désormais accès aux plateformes de streaming, au replay et autres moyens digitaux afin de regarder les films à la demande. Cela a certainement contribué à permettre aux longs-métrages d’élargir leur récit. Si le téléspectateur peut s’enfiler quatre épisodes de suite de Game of Thrones, ce n’est plus un Marvel de trois heures qui va lui faire peur.

Preuve que cette tendance va durer, les films indépendants et le cinéma d’auteur eux aussi se permettent de prendre leurs aises. Ainsi le nouveau film de Justine Triet, Anatomie d’une chute, Palme d’or à Cannes et actuellement sur les écrans helvétiques, profite en plein de sa durée de plus de 2 h 30. Une telle histoire, complexe et détaillée, n’aurait sans doute pas pu être mise en scène en 1 h 45.

Cléopâtre

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