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Passé et avenir des espèces ligneuses au Jardin botanique

Dans un nouvel espace permanent, le Jardin botanique de Fribourg s’interroge sur l’état des arbres

Jardin botanique; rencontre avec le professeur Gregor Kozlowski, Annick Monod et ? pour parler d'un nouvel espace dédié aux arbres Photo Lib / Charly Rappo, Fribourg, 17.04.2023Charly Rappo/Charly Rappo / La Liberté

Mélanie Gobet

Mélanie Gobet

20 avril 2023 à 19:05

Climat» Thématiser la menace sans pour autant prendre un ton catastrophiste. Voilà la mission que s’est donnée le Jardin botanique de l’Université de Fribourg en créant le secteur intitulé «Arbres du passé - Arbres d’avenir». Inauguré samedi, ce nouvel espace permanent de 2000 mètres carrés (le deuxième plus grand du Jardin) est dévolu aux espèces ligneuses et a pour but de sensibiliser les visiteurs aux conséquences du réchauffement climatique et à la crise de la biodiversité. «La situation est grave, mais nous préférons inciter à réagir et à protéger plutôt que de faire déprimer le grand public», insiste le professeur Gregor Kozlowski, directeur du Jardin botanique.

Pour ce faire, une cinquantaine d’arbres d’espèces différentes, parmi lesquelles de très anciennes, se côtoient dans un espace didactique et ludique, sur les hauts du jardin. Une moitié y pousse depuis longtemps, l’autre moitié a été nouvellement plantée. «Nous avons construit à partir de l’existant pour créer du nouveau», indique Alain Müller, responsable du pôle technique.

«La situation est grave, mais nous préférons inciter à réagir et à protéger.»
Gregor Kozlowski

Ceci dans un propos cohérent, en exposant les enseignements tirés de l’étude des arbres qui ont survécu aux gros bouleversements de la Terre depuis des millions d’années. «Comment peuvent-ils nous apprendre des choses aujourd’hui?» interroge Annick Monod, responsable du pôle public du Jardin botanique.

Enrichir la collection

D’un point de vue scientifique, il s’agit pour Gregor Kozlowski et son équipe d’enrichir leur collection et d’essayer de sauver certaines espèces. «Depuis treize ans, plusieurs ligneux à travers le monde ont été notre priorité.» Des espèces appartenant aux reliques glaciaires (voir ci-dessous) sont notamment au centre des recherches de l’institution.

Alors que plusieurs arbres présentés dans le secteur sont menacés ou protégés, certaines espèces constituent l’avenir, à l’instar du tilleul tomenteux. Supportant la chaleur et le sec, il tolère aussi les polluants atmosphériques et les sols compactés, faisant de lui un candidat tout trouvé pour peupler les villes.

Contrairement aux 22 autres secteurs du Jardin botanique, cet espace fait davantage que présenter une collection. Il propose une réflexion. «Nous avons décidé de montrer tous les éléments possibles autour de l’arbre, développe Gregor Kozlowski. Leur importance biologique, anatomique, mais aussi leur importance pour nous, humains, dans la diminution des effets du changement climatique.»

Et de rappeler ces chiffres: «Un tiers de toutes les espèces d’arbres de la planète sont aujourd’hui menacées et plusieurs centaines ont disparu.» La situation est également alarmante par le nombre d’individus rasés. «En Europe, 60 à 70% des surfaces forestières ont été éliminées, et 35% à l’échelle mondiale.» Tandis que des arbres qu’il étudie ont pu survivre aux périodes de glaciation, Gregor Kozlowski rappelle que ces évolutions ont pris des milliers d’années. L’influence de l’homme sur le climat se joue en quelques décennies. Alain Müller témoigne: «De mémoire de jeune jardinier, certaines plantes cultivées aujourd’hui à Fribourg ne pouvaient pas y pousser il y a vingt ans.»

60

En pourcentage, le nombre de surfaces forestières éliminées en Europe

Muséographie soignée

En réunissant les forces en présence, l’institution propose un secteur «à l’intérêt scientifique pointu et accessible au grand public», promet Annick Monod. «Arbres du passé - arbres d’avenir» pourrait bien devenir la nouvelle attraction phare du jardin fribourgeois. La muséographie y est importante et soignée, avec une trentaine de panneaux explicatifs. Y sont par exemple abordés l’histoire des premiers arbres il y a 400 millions d’années ou le rapport de l’homme au bois, son utilisation à la préhistoire jusqu’à la récente construction d’un immeuble de 20 étages inauguré en Suède.

Atout indéniable: la présence de fossiles cachés dans des boîtiers en métal, accessibles à tous. Ces empreintes de feuilles d’arbres dévoilent aux visiteurs les secrets et origines des plantes ligneuses. «Certains fossiles sont contemporains des dinosaures. Cela donne le vertige», pointe Annick Monod. Le visiteur ne doit cependant pas s’attendre à découvrir des prêles et fougères arborescentes adorées des dinosaures. «Nous montrons différentes plantes de l’hémisphère nord, mais pas des tropiques», prévient Alain Müller.

Nouvel abri en mélèze

Une cabane fraîchement construite et composée en partie de mélèzes situés précédemment sur le site offre un couvert bienvenu et utile pour le déploiement d’activités en extérieur. Y est abritée une initiation à la dendrochronologie (méthode de datation par l’étude des anneaux de croissance des troncs). Petits et grands découvriront des exemples de spécimens dont les cernes présentent des traces caractéristiques laissées par des canicules ou des chutes de pierres. Le secteur est par ailleurs ponctué de pauses ludiques, comme ces cubes en bois qui représentent la circonférence de l’arbre le plus volumineux au monde, le séquoia géant General Sherman, en Californie.

Ce nouvel espace a pu voir le jour après que l’institution a reçu une importante somme d’un généreux donateur. Ce dernier avait à cœur de transmettre quelque chose aux générations futures. C’est chose faite dans ce coin où les arbres déterminants des années à venir et les espèces menacées vont pouvoir pousser en toute quiétude. «C’est un secteur qui demande de la patience et dont le résultat final ne sera visible que dans plusieurs dizaines d’années», conclut Annick Monod.

  •  Inauguration samedi à 16 h, conférence d’Alexis Jenni à 17 h et visites guidées à 18 h
Trois espèces d’arbres reliques à retrouver au jardin botanique

Pinus cembra.

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