Logo

Page jeunes

La Plateforme, critique moderne du capitalisme

L’article en ligne – TV » Le thriller dystopique réalisé par Galder Gaztelu-Urrutia, disponible sur Netflix depuis le 20 mars dernier, arrive à point nommé pour se remuer les méninges pendant le confinement. C’est parti pour 1h34 de purs frissons!


Louis Rossier

Louis Rossier

20 avril 2020 à 17:04

De son nom original El Hoyo (Le Trou), ce long-métrage espagnol fait sa grande entrée dans nos petits salons. Confinement oblige, les cinémas sont fermés et ce sont les plateformes en ligne qui prennent le relai, non sans succès. Véritable satire anticonsumériste, ce film d'anticipation est en ce moment sur toutes les bouches. 

De quoi parle l’histoire ? L’intrigue se déroule dans La Fosse, une prison verticale dont le système est pour le moins tordu. Une plateforme garnie de délicieux mets descend graduellement une fois par jour tous les étages de la prison pour nourrir l’ensemble des prisonniers. Les étages supérieurs étant privilégiés puisque servis en premier, les détenus du haut ne se privent pas de se gaver au détriment des étages inférieurs qui n’ont plus rien à se mettre sous la dent et courent donc le risque de mourir de faim. 

On découvre l’histoire au travers du regard de Goreng, un personnage optimiste qui rejoint volontairement la prison pour six mois afin d’obtenir un certificat. Atterrissant au sein d’un étage intermédiaire où il est encore possible de se nourrir, il apprend par son partenaire de cellule que les détenus sont transférés chaque mois de manière aléatoire à un étage différent, pour le meilleur et pour le pire. Plongé dans l’enfer de cette prison verticale, Goreng, qui n’est autre que l’incarnation physique et idéologique de Don Quichotte, une œuvre dont il se dit lui-même inséparable, se donne la mission ô combien ardue d’abolir le système profondément injuste de La Fosse. La descente aux Enfers peut commencer !

L’Enfer, c’est le système

Si ce film indépendant est un véritable petit bijou de la critique capitaliste moderne, il n’est pas facile à décoder pour autant. Les personnages sont infiniment complexes, les intentions de l’Administration de La Fosse ne sont jamais clairement explicitées, sans compter que même la fin refuse de délivrer des réponses claires. En somme, c’est au téléspectateur de fournir sa propre interprétation des événements et des enjeux qui s’y déroulent. Il ne faut donc pas s’attendre à un film qui vous offrira ses mystères sur un plateau d’argent, place à l’imagination ! Personnellement, je trouve cela d’autant plus excitant. 

Ce huis-clos dystopique, allégorie d’une lutte des classes ardue et violente, dénonce les méthodes d’un système pervers où la violence engendre la violence, condamnant les individus vulnérables à une mort certaine. Grâce à la verticalité du système des étages, la métaphore capitaliste est d’autant plus flagrante qu’elle en devient indéniable : si les plus défavorisés du bas sont incapables de se faire entendre des privilégiés du haut, c’est bien parce que le système les en empêche. La crème de la crème pour les uns, les miettes et l’indifférence pour les autres. 

Rien de tel pour faire écho à notre situation actuelle bouleversée par la crise sanitaire, où des gens continuent à dévaliser éhontément les denrées non-périssables des magasins, où de nombreux travailleurs de secteurs socialement et financièrement dévalorisés continuent d’être envoyés au travail malgré les risques qu’ils encourent, et où l’entraide entre les différentes nations est pour le moins mise à l’épreuve… Dystopie ou non, La Plateforme n’a pas peur de se faire miroir de notre époque actuelle, encore faut-il oser se regarder en face. 


Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus