Mobilier urbain » Qui n’a pas erré ces derniers mois, un gobelet de café brûlant dans une main, un sandwich dans l’autre, en quête d’un banc pour se reposer, faute de pouvoir recharger ses batteries dans un restaurant? Avec la longue fermeture de tous nos lieux d’échanges habituels, nous avons réinvesti à qui mieux mieux les bancs et toutes les autres assises informelles qui nous tombaient sous les fesses: murets, escaliers, rochers, pelouses et autres souches. A Lausanne, le Musée de design et d’arts appliqués (Mudac) vient de lancer d’excellentes balades guidées en l’honneur des bancs (voir l’encadré), ces grands acteurs du mobilier urbain qu’on utilise souvent sans même y prêter attention. Une sociologue y consacre, elle, toute son énergie. Renate Albrecher est assistante scientifique au Laboratoire de sociologie urbaine de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dirigé par Vincent Kaufmann. Elle y mène une recherche sur le rôle des bancs publics dans la promotion de la marche à pied. Elle a également fondé en 2016 l’association Bankkultur, qu’elle préside, et qui recense de façon participative, et avec beaucoup d’enthousiasme, les bancs publics de Suisse.
Pourquoi avoir créé une association en l’honneur des bancs?
Renate Albrecher: J’ai étudié la sociologie urbaine, qui m’a sensibilisée aux espaces publics. Par la suite, j’ai commencé à m’intéresser au banc public, qui est un objet omniprésent mais méconnu: on le voit sans le voir. Les bancs ne sont même pas recensés sur une carte! Pourtant ils nous invitent à un geste d’hospitalité. Et souvent à découvrir de beaux endroits. En Suisse, la densité des bancs est élevée, même en dehors des villes. Ce qui n’est pas étonnant puisque le banc public était un outil clé du tourisme au XIXe siècle. Et du symbole originel du beau paysage, il est devenu aujourd’hui – à tort – l’attribut des personnes âgées. Quand bien même les observations que nous menons à l’EPFL nous montrent que tout le monde l’utilise, pas seulement les seniors. Notre association a donc pour but de mieux comprendre et promouvoir la culture de cet objet.