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Jardinage. il est temps de soigner cette vieille trogne

Photographer: Jean-Luc Pasquier/Copyright: Jean-Luc Pasquier

9 janvier 2023 à 17:25

Chronique jardinage » A l’abri des brumes dans leur grotte de fortune, les lions de la soirée passée n’en mènent pas large ce matin. La tête enfarinée et les yeux en tranches d’oignon, ils seraient presque mignons devant leur petit bol de bouillon. Mais les odeurs fauves mêlées aux relents d’éthanol freinent illico la tentation de les caresser comme des petits chatons.

Dans le ciboulot de ces lève-tôt, une bande de nains hystériques jouent déjà la célèbre symphonie des casseroles infernales. Pendant ce temps, ceux qui sont encore figés dans le coaltar rêvent comme des héros, alors qu’ils sont échoués dans des positions indécentes. La veille au soir, cette équipe de joyeux lurons s’étaient pourtant juré de bien s’hydrater et de ne pas trop boire. Quelques heures plus tard, tous sont arrivés à saturation et se sont mis à faire comme d’habitude, c’est-à-dire à peu près n’importe quoi. Désormais, les derniers ronflements font place à des mugissements et tous prennent vaguement conscience de leur piteuse condition en entrouvrant les fentes qui protègent leurs globes oculaires rougis par les excès.

Fut un temps où…

Soudain, plus un bruit, plus un mot… Ils se dévisagent lentement et constatent avec stupeur qu’ils ont vraiment fait les idiots. Et pas qu’un peu: la plupart d’entre eux présentent une crinière très clairsemée, voire carrément tondue. Ces couillons réalisent maintenant que le concours de tonte de mouton s’est bel et bien déroulé! Mais avec tout ce qu’ils ont bu en vin, c’étaient bien eux les ovins…

Dans une époque pas si lointaine, les campagnes ne disposaient pas de zones artisanales saturées de véhicules et de commerces en tout genre. Chaque ferme s’occupait de produire ses propres denrées alimentaires ainsi que tous les matériaux nécessaires pour à peu près tout faire. Ainsi, le poulailler et le potager nourrissaient la famille et tout le monde était très reconnaissant de manger chaque jour.

Les hommes cultivent des trognes depuis des millénaires

Pour les matériaux, la forêt livrait le bois d’œuvre pour les charpentes, et les trognes fournissaient des tiges pour la vannerie, du fourrage pour les bêtes et du bois pour les piquets et le feu. Les hommes cultivent des trognes depuis des millénaires, inspirés de la nature qui après un ouragan fait repousser les saules et les peupliers à l’endroit du tronc où ils s’étaient brisés. L’ère industrielle et la mécanisation ont hélas tôt fait d’oublier cette pratique pourtant facile et très rentable. En effet, rien de plus simple que de cultiver des ligneux produisant autant de bienfaits sur si peu de surface.

Qu’est-ce qu’une trogne ?

Au-delà du faciès bouffi des éternels fêtards, le terme de trogne désigne des arbres ou des arbustes dont on a étêté la cime dans leur jeunesse, à la hauteur souhaitée, et dont on taille à épisodes réguliers l’entier du houppier à ladite hauteur. A force de répéter cette tonte, le bourrelet cicatriciel d’où jaillissent les branches grossit avec le temps et forme une excroissance ressemblant à une belle tête de vainqueur sur un petit corps fluet. De nombreuses essences sont adaptées à cette tonte régulière et étaient sélectionnées selon les usages visés. Ainsi, les aulnes, charmilles et bouleaux servaient à l’affouragement et à fabriquer des balais, les châtaigniers des manches d’outils ou des poteaux et les alisiers pour les fruits.

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