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Sur les pas

Les mondes parallèles de John Howe

Promenade monacale dans les couloirs du temps avec l’illustrateur du Seigneur des anneaux


26 juillet 2021 à 04:01

Sur les pas (1/6) » Pour ce premier volet consacré à des lieux inspirants, le célèbre illustrateur fantastique nous ouvre les portes d’une chartreuse du XIVe siècle, nichée au bord du lac de Neuchâtel entre Concise et Vaumarcus.

C’est dans le recueillement et la sérénité de la chartreuse de La Lance que nous avons rencontré John Howe. Il ne fallait pas moins que ce cloître du XIVe siècle pour ce moment de partage exceptionnel avec le créateur inspiré à l’origine du monde visuel du Seigneur des anneaux.

Nous sommes dans l’une des dernières chartreuses de Suisse, perdue au milieu des vignobles et des champs entre Concise (VD) et Vaumarcus (NE). A l’abri des clameurs du monde, dissimulé au fond de l’ancien monastère, ce joyau se laisse découvrir au bout d’un corridor sombre, un peu mystérieux. Et là, dans le clair-obscur d’une petite cour ouverte aux quatre vents, on découvre un havre sept fois centenaire, miraculeusement épargné par le temps.

«C’est vrai, j’aime bien ce qui est caché»
John Howe

«J’aime tout ici», relève d’une voix douce John Howe, qui a «exceptionnellement» pu obtenir les clés du site fermé au public pour le moment. Le Canadien, établi à Neuchâtel depuis 35 ans, est heureux de nous faire découvrir ce monument «magique». Et dans la bouche d’un maître du réalisme fantastique, le mot si souvent galvaudé prend toute sa dimension métaphysique.

Il sait qu’on ne sait rien

Illustrateur de l’univers culte des livres de Tolkien (Le Seigneur des anneaux, Le Hobbit), concepteur artistique des films du même nom de Peter Jackson, vénéré comme le Messie sur la planète du cinéma fantastique, l’artiste de 62 ans traverse la vie en homme tranquille, à l’écoute, le regard émerveillé et affûté sur toutes choses.

De son enfance passée dans une ferme en Colombie-Britannique, il a gardé un rapport authentique avec la nature et, peut-être aussi, cette démarche souple de chat maigre qui trahit le promeneur aguerri. Il y a du Socrate chez ce féru d’histoire, de littérature, d’architecture, de sciences. Il sait qu’on ne sait jamais rien.

Evidemment, on tente de lui arracher les vers du nez à propos de la très attendue série du Seigneur des anneaux qui aurait dû sortir en 2021. Mais motus: Amazon, qui a acheté les droits TV mondiaux, bétonne toute communication.

Les miracles du temps

Tant pis. Revenons à nos paisibles chartreux et à leur longue histoire dans la région de Grandson et Neuchâtel. Au-delà des vestiges architecturaux, ce sont les traces humaines qui fascinent l’artiste, «l’empreinte laissée dans la pierre par des gens qui ne sont plus là depuis des siècles».

Il ajoute: «Regardez ici, les astuces des architectes de l’époque, ces petites colonnes qui soutiennent le tout. C’est fou de retrouver ces témoignages intacts après tout ce temps.» Oui, c’est bien le familier de l’univers des hobbits qui nous parle; l’artiste qui, d’un trait infiniment poétique, redonne vie à de très anciennes mythologies.

Un lieu secret

Sa passion pour l’histoire médiévale remonte à ses études à l’Ecole supérieure des arts décoratifs de Strasbourg. Et là aussi, comme aujourd’hui, il avait réussi à obtenir le sésame lui ouvrant les portes de la flèche de la cathédrale de la capitale alsacienne: «Un lieu secret avec des sculptures que personne ne voyait. C’est vrai, j’aime bien ce qui est caché», sourit cet arpenteur des mondes parallèles. Il désigne d’un geste ample le cloître où nous nous trouvons: «Regardez, ce site est proche de la route cantonale, on voit le domaine de La Lance depuis le train, mais personne ne se doute que ces bâtiments abritent une ancienne chartreuse.»

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