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Canton

Violence domestique. témoignages

Deux femmes victimes de violences conjugales témoignent de leur vécu et partagent leur inquétude pour le sort de leurs enfants. 

Les cas de violence, notamment de violence conjugales, ont augmenté l'an dernier en Suisse (photo d'illustration).MAURIZIO GAMBARINI

Raphaël Kadishi

Raphaël Kadishi

5 janvier 2023 à 13:41

Victime de violences, séparée de son conjoint, une mère s’inquiète aujourd’hui pour son enfant. Charlotte Raven, elle aussi victime de violences domestiques, a cherché à défendre ses enfants en écrivant un livre.

«Quand il veut la porter, elle hurle»

Témoignage » Victime de violences conjugales, Isabelle* est séparée de son époux depuis plusieurs mois mais la question de la garde de leur fille, âgée de trois ans à peine, ne lui permet pas de reprendre son souffle. «Son père veut passer un week-end sur deux et la moitié des vacances avec elle. Mais j’ai peur. Lorsque nous vivions ensemble, il ne s’en occupait jamais. Aujourd’hui, quand il veut la porter, elle hurle», raconte-t-elle.

«J’ai tout le temps peur»
Isabelle*

Elle était enceinte lorsque sa vie de couple s’est transformée en enfer. «C’est durant cette période qu’il a commencé à m’isoler de mes proches, à me menacer pour tout et pour rien, à m’insulter. A la fin de ma grossesse, je devais rester couchée mais il ne m’a aidée en rien. Il ne s’intéressait pas du tout à notre futur rôle de parents, et mon accouchement l’a laissé indifférent. Ça n’a malheureusement pas changé à mon retour de la maternité avec le bébé», poursuit-elle.

Les premiers actes de violence physique commencent lorsqu’elle reprend le travail. «Contrarié par le fait que nous devions nous organiser pour nous occuper de notre fille et gérer le ménage, il se mettait hors de lui, cassait les meubles, les jouets. Il me serrait la gorge, le bras et me couvrait d’injures. Plusieurs fois, j’ai dû quitter notre logement pour me mettre à l’abri avec mon enfant», se souvient-elle.

Un jour, Isabelle appelle la police. Elle dit stop. Définitivement. Son mari fait alors l’objet d’une mesure d’éloignement. Il ne reviendra plus jamais vivre auprès d’elle. «Mais depuis, c’est encore pire. Je suis bombardée de messages. Il me dit qu’il va m’enlever l’enfant et partir avec elle. J’ai tout le temps peur.»

Au début de la séparation, Isabelle pense encore qu’il a le droit de voir leur fille. Elle reconnaît son rôle de père et organise des rencontres sur des places de jeux. «Mais entre eux, le contact ne passe pas. Après quelques minutes, elle vient se réfugier dans mes bras et ça tourne court, si bien que je me suis résignée. Je me dis qu’on ne peut pas forcer un enfant à voir un parent, comme on ne peut pas forcer un parent à aimer son enfant. Ça me déchire le cœur de savoir que ma fille a un père mais qu’elle souffre lorsqu’elle le voit», dit-elle.

La question de la garde n’est pas encore réglée, et Isabelle est inquiète. «Je suis révoltée, car il me revient de prouver ce que j’avance alors que lui semble avoir le droit de son côté. Même mon avocat pense qu’un enfant ne peut pas être coupé d’un parent et que cette séparation peut entraîner des troubles plus tard. Je crains que la justice ne soit du même avis», conclut-elle. MAG

*Prénom d’emprunt

«La culture de la protection»

Charlotte Raven a été victime de violences domestiques entre 1992 et 2004. Malgré ces alertes, elle n’a pas pu empêcher que ses enfants soient à leur tour victimes de violences. Sous ce pseudonyme, elle témoigne dans un livre, Je l’ai sentie dans mon corps, ou donne des conférences, comme récemment à Fribourg, dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
«D’un point de vue statistique, c’est souvent la mère qui a la garde des enfants. Si jamais elle craint des sévices, des attouchements ou de la violence de la part de son ex-conjoint, il lui est difficile de se soustraire au droit de visite ou d’hébergement», note-t-elle.

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