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Préfectures

Ils se rêvent préfet en Sarine

Quatre candidats partent à l’assaut de la Préfecture de la Sarine. Le camp bourgeois aligne deux prétendants, tandis que la gauche unie présente une seule candidature pour tenter de succéder à Carl-Alex Ridoré

Vue de Fribourg. Photo Lib/Alain Wicht, Fribourg, 26.02.2017 La Grand'Rue et la cathédraleAlain Wicht/Alain Wicht/LaLiberté

4 octobre 2021 à 04:01

Temps de lecture : 1 min

Sarine » En main de la gauche depuis 2008, la Préfecture de la Sarine est convoitée par quatre candidats pour la prochaine législature. Une femme et trois hommes briguent le poste. Le centriste Christian Clément (Arconciel, 46 ans), la socialiste Lise-Marie Graden (Fribourg, 47 ans), l’UDC Nicolas Kolly (Essert, 35 ans) sont en lice, tout comme Claudio Rugo (Fribourg, 55 ans), du Parti des artistes.

La gauche mise sur une candidature unique. Lise-Marie Graden, conseillère générale à Fribourg, avocate de formation et cheffe du Service de la justice du canton de Fribourg, se présente en effet sur une liste réunissant le PS, les Verts et le Centre gauche-PCS. De son côté, la droite part divisée, avec deux candidats venant de la Haute-Sarine. Christian Clément défend les couleurs du Centre. Président de la section Sarine-Campagne de son parti depuis 2019, cet ingénieur en microtechnique de formation travaille comme cadre aux CFF, dans le domaine informatique. Impliqué dans le tissu associatif, il a notamment été fondateur, puis président de la Fédération fribourgeoise des chorales de 2005 à 2017. Autre poulain de la droite, l’UDC Nicolas Kolly est député au Grand Conseil depuis 2011. Il y occupe la fonction de chef de groupe depuis 2019. Il bénéficie d’un parcours professionnel atypique: il a commencé par un CFC de mécanicien sur machines agricoles et a enchaîné avec un brevet d’avocat. Il est actif en droit administratif et dispose aussi d’une formation de procureur avec un CAS en magistrature pénale.

Le quatrième candidat s’est lancé dans la course au dernier moment. Claudio Rugo, musicien, siège au Conseil général de Fribourg sous la bannière du Parti des artistes. Il est également candidat au Conseil d’Etat.

Pour rappel, l’actuel préfet socialiste, Carl-Alex Ridoré, a décidé de quitter cette fonction lorsqu’il a choisi de se porter candidat à l’élection complémentaire aux Etats. Il a été battu par la centriste Isabelle Chassot. Depuis l’élection des préfets par le peuple en 1976, la Préfecture de la Sarine avait toujours été en main du PDC jusqu’à l’entrée en fonction de Carl-Alex Ridoré en 2008.


Christian Clément 46 ans, Le Centre, Arconciel

Vous n’avez pas eu de mandat électif, vous n’êtes pas juriste et vous mettez en avant votre engagement dans le milieu associatif: n’est-ce pas léger pour viser la Préfecture de la Sarine?

Mes engagements associatifs sont importants, mais je suis aussi un expert dans la mobilité, la gestion et l’analyse de dossiers complexes, avec des expériences publiques-privées hors du canton et je suis bilingue. Parmi les préfets actuels, quatre ne sont pas juristes et cela ne pose pas de problème. Dans une préfecture, il y a un cadre juridique à appliquer. En dehors de ça, vous avez une marge de manœuvre, où le bon sens prime et où une capacité d’analyse est nécessaire. Concernant l’expérience politique, c’est aussi un avantage d’être frais.

Avec le slogan «Le changement, c’est Clément» vous vous inspirez de l’ancien président français socialiste François Hollande et de son «Le changement, c’est maintenant»?

Non, pas du tout. Le thème du changement était clair et nous avons cherché en famille un slogan qui marque. Il y a un certain nombre de points à corriger, dont la prise de décision rapide et le pragmatisme. Ma première action concrète serait d’introduire un monitoring de tous les dossiers traités par la préfectu re pour savoir où ils en sont. Pour les citoyens, les communes et les entreprises, trop de dossiers sont aujourd’hui bloqués. Ensuite, il ne faut plus arriver avec des projets qu’on essaie d’appliquer depuis le haut. Le rôle du préfet est de faire le lien entre les citoyens et l’Etat et pas uniquement de représenter l’Etat. Il faut vraiment aller au contact des citoyens et des communes pour faire avancer le district ensemble. En Sarine, c’est chacun pour soi. Il n’y a pas d’unité et c’est cet esprit Sarine que je veux créer.

Si vous êtes élu, serez-vous un moteur d’une fusion du Grand Fribourg?

La fusion n’est plus une option à court terme. Nous devons par contre viser le renforcement de la région Fribourg et une coordination entre les communes. Le futur de l’agglo et le développement de l’Association régionale de la Sarine sont aussi ouverts. Pour arriver avec des projets ambitieux pour le Grand Fribourg, il n’y a pas besoin de fusion. Le canton a besoin d’un centre fort, mais il ne faut pas lui imposer les idées. Ce sont les projets qui vont faire avancer le district, pas une organisation administrative qui touche très peu les citoyens. Les gens ont besoin de solutions concrètes à leurs problèmes quotidiens et de rêves.

Quelle est l’infrastructure qui manque au district?

C’est en matière de mobilité que le citoyen est le plus pénalisé. Il manque un axe de transport public efficace Marly-Givisiez, qui traverse toute la ville de Fribourg. Le deuxième axe, c’est la fin du contournement de la ville qui passe par Marly-Matran. L’un ne va pas sans l’autre. C’est un concept de mobilité qu’il faut penser au niveau du district, avec un transfert modal efficace, en proposant le bon moyen au bon endroit.

Le district de la Sarine n’est-il pas trop grand pour une seule préfecture?

Je suis contre l’idée de séparer la ville de Fribourg du reste du district. Ce serait créer un fossé encore plus grand entre la ville et la campagne et limiter les réflexions en termes de région. Par contre, certaines tâches administratives de la préfecture pourraient être déléguées à la ville.

Divisée, la droite parviendra-t-elle à reconquérir la préfecture?

C’est l’objectif. Nous avons eu des discussions avec le PLR et l’UDC. Nous ne sommes pas arrivés à trouver un profil commun. Les citoyens ont le choix. Nous allons certainement pouvoir nous entendre pour le deuxième tour. TG


Lise-Marie Graden 47 ans, PS, Fribourg

Le poids de votre parti vous donne-t-il un avantage?

Non. Mais je suis reconnaissante d’être la candidate de toute la gauche. Dans toute élection, c’est bien entendu le peuple qui décide et je me soumettrai à son verdict, comme mes trois concurrents, pour lesquels j’ai d’ailleurs un profond respect. Ce n’est pas parce que le préfet sortant est socialiste que cela me donne un avantage. L’élection à la préfecture est politique, mais l’appartenance à un parti perd de son importance pour le travail quotidien. Bien sûr que nous avons tous des valeurs, mais l’immense majorité des dossiers traités dans une préfecture ne sont pas politisés. Un préfet est d’abord au service des citoyens et des communes. C’est un rôle où la personne fait toute la différence. En revanche je me réjouis de mener cette campagne et je suis déterminée à tenter de gagner cette élection.

Que pensez-vous pouvoir apporter au district?

Ma manière de travailler. J’aime aller au contact des gens, les écouter et trouver des solutions. Créer des liens entre les personnes me paraît être le rôle du préfet, sans empiéter sur les compétences des communes. J’ai une capacité reconnue à faire avancer les dossiers. Je l’ai prouvé en m’impliquant très activement comme conseillère générale à Fribourg depuis 2011 et comme présidente de la commission financière. J’ai démontré que je peux dialoguer avec tous les partis pour trouver des solutions non partisanes. Je connais également très bien le fonctionnement de l’Etat: avocate de formation, je suis à la tête du Service de la justice, qui fait le lien entre le pouvoir judiciaire et l’exécutif. Mon quotidien est fait de négociations entre des mondes qui ne sont pas toujours d’accord. Cela m’aidera clairement à la tête de la préfecture.

Quelle sera votre première action concrète si vous êtes élue?

J’écrirai au Bureau de l’égalité pour demander que le mot préfète devienne officiel. Jusqu’à présent, ce terme désigne l’épouse du préfet. C’est un peu une boutade, mais je trouve important que des termes féminins soient consacrés pour toutes les fonctions de l’Etat. Pour l’instant, la question ne se posait pas car il n’y a jamais eu de femme préfet dans le canton. S’agissant des grands dossiers, avant de faire quoi que ce soit, je discuterai avec mon équipe, je ferai le tour des communes et j’irai rencontrer les gens. Je n’arrive pas avec des certitudes mais avec la volonté d’associer tout le monde. Je veux que toutes les régions de la Sarine soient traitées de manière égale.

Comment envisagez-vous la suite de la fusion du Grand Fribourg?

Dans l’immédiat, le préfet a peu de marge de manœuvre car son rôle est déterminé par la loi: il doit gérer l’assemblée constitutive du Grand Fribourg pour une fusion dont le périmètre a été dessiné par le canton. Quel que soit le destin de cette fusion, je suis persuadée que dans l’avenir des collaborations vont être initiées entre les différentes communes. A titre personnel, je suis convaincue par la nécessité d’avoir un centre cantonal fort, mais il est fondamental d’écouter et d’accompagner toutes les communes. Si des communes souhaitent fusionner je ferai tout ce que je peux pour les soutenir.

Y a-t-il une infrastructure qui manque dans le district?

L’Association régionale de la Sarine (ARS) est heureusement en passe d’être réalisée. Il manquait une infrastructure qui permette de défendre les intérêts de toutes les communes, et pas seulement ceux d’une partie du district. Dans le domaine culturel, nous devrions trouver un moyen pour simplifier le millefeuille administratif, qui est limitant en termes de politique culturelle. Cela nous donnerait la possibilité d’être plus ambitieux. PC


Nicolas Kolly 35 ans, UDC, Essert

En tant qu’UDC, comment allez-vous convaincre l’électorat sarinois qui est majoritairement urbain et de gauche?

Je ne me présenterais pas si je ne pensais pas avoir une chance. Je crois avoir en toute humilité le profil de la fonction. J’appréhende cette élection comme une postulation auprès des citoyens de la Sarine qui seraient mon employeur. Le préfet est un juge administratif et pénal. Cette matière est mon pain quotidien dans mon activité professionnelle actuelle. En tant qu’avocat actif en droit administratif, surtout en aménagement du territoire et en droit de la construction. J’ai aussi une formation de procureur. Avec ce qui s’est passé pour la gauche à l’élection complémentaire au Conseil des Etats, on constate que c’est possible pour un candidat du centre droit de réunir une majorité derrière lui. Je me situe clairement sur l’aile agrarienne de l’UDC, étant issu d’une famille d’agriculteurs, je pense donc pouvoir convaincre des électeurs centristes. Ma première formation est un CFC de mécanicien sur machines agricoles. Cela me donne un rapport direct à la réalité, j’aborde les problèmes avec un certain pragmatisme. Et j’ai déjà eu d’excellents retours sur ma candidature, aussi en dehors de l’UDC.

Comment imaginez-vous votre rôle de préfet par rapport à ce qu’il reste de la fusion du Grand Fribourg?

Le fait de donner au préfet le rôle de président de l’assemblée constitutive a été une grande erreur. On ne peut pas imposer cette fusion par le haut, il faut maintenant respecter le vote. Même si avoir un centre cantonal fort est important, le Grand Fribourg peut se créer autrement, avec la pleine adhésion des communes concernées.

Vous vous positionnez ainsi en porte-à-faux avec le discours récent de Didier Castella qui suggérait que l’Etat devrait reprendre les commandes dans ce dossier?

Les citoyens n’ont pas vu ce qu’ils avaient à gagner dans cette fusion. Déconstruire des communes qui fonctionnent bien n’était pas compréhensible pour les citoyens. Le préfet doit avoir un rôle d’accompagnateur. A Fribourg, les fusions obligatoires ne sont pas permises, il faudrait modifier la constitution, mais j’attends de voir ce que le Conseil d’Etat va proposer.

Qu’apporterez-vous au district?

Je souhaite surtout amener davantage de sérénité, avec un meilleur fonctionnement de la préfecture. J’aimerais m’impliquer pleinement dans les procédures de permis de construire, de sécurité publique. Comme avocat praticien, je me demandais parfois s’il y avait encore un préfet en Sarine ces dernières années dans certains domaines. J’ai deux priorités: remettre sur pied de manière régulière des procédures de conciliation administratives afin de désengorger la Justice, et développer un service de soutien efficace aux communes.

Quelle est l’infrastructure qui manque au district?

Même si on a essayé de lui donner ce rôle ces dernières années, le préfet n’a pas de compétence directe en matière d’infrastructures. Ces démarches appartiennent aux communes et au canton. Mais pour répondre à votre question, la liaison Marly-Matran est essentielle notamment afin de désengorger la ville de Fribourg d’un fort trafic. Le développement du système de santé au sens large est aussi important, avec le souci que toutes les régions soient dotées d’un home.

Le district n’est-il pas trop grand pour une seule préfecture?

Non, si le préfet s’entoure des bons professionnels. Mais j’ai l’impression que le préfet hérite de toutes les tâches que l’on ne sait pas à qui donner. Il est ainsi devenu un magistrat représentant de l’Etat avec des compétences dignes d’un inventaire à la Prévert. Il faudrait corriger cela, mais ce n’est pas valable que pour la Sarine. SB


Claudio Rugo trouble-fête

A côté des représentants des partis traditionnels, Claudio Rugo a décidé de se lancer dans la course à la Préfecture de la Sarine, sous la bannière du Parti des artistes. «C’est un peu une candidature de dernière minute. Le but était de déjouer les pronostics et la routine», concède celui qui est aussi candidat au Conseil d’Etat et au Grand Conseil. Il précise que le Parti des artistes prévoyait de lancer dans la course un autre candidat, mais ce dernier s’est désisté «pour des raisons professionnelles».

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