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France. Des élections chaotiques à l'Assemblée nationale française

Un "bourrage d'urnes" au Parlement français: l'élection des vice-présidents de l'Assemblée nationale a donné lieu aux premières passes d'armes de la 17e législature vendredi. Un vote a été annulé en raison d'un trop grand nombre de bulletins par rapport aux votants.

La macroniste Yael Braun-Pivet, réélue la veille au perchoir, mène la série d'élections de postes-clefs au parlement.KEYSTONE/EPA/TERESA SUAREZ

ATS
AFP

ATS et AFP

19 juillet 2024 à 17:46, mis à jour le 20 juillet 2024 à 01:30

Temps de lecture : 1 min

A l'issue des deux tours, six vice-présidents ont été élus, dont deux de la France insoumise mais aucun du Rassemblement national. Les trois postes de la questure sont revenus dans la soirée à Brigitte Klinkert (Renaissance), Christine Pirès Beaune (PS) et Michèle Tabarot (LR).

Mais les premières opérations de vote se sont déroulées de manière houleuse, un scrutin ayant dû être annulé, après l'apparition suspecte de dix enveloppes surnuméraires dans les urnes.

Une source parlementaire a confié à l'AFP n'avoir "aucun précédent en tête" d'une telle situation. "Honte à ceux qui ont pratiqué cette fraude", a tonné dans l'hémicycle le député PS Jérôme Guedj, demandant une enquête et la révision des modalités de vote.

"Triste du spectacle qu'on donne"

Salle des Quatre-colonnes, où les députés rencontrent la presse, les élus se montraient désabusés. "Je suis un peu triste du spectacle qu'on donne", a réagi Jean-René Cazeneuve (Ensemble pour la République, ex-Renaissance). "Le soupçon par rapport au bourrage d'urnes existe", a relevé le porte-parole de la droite républicaine, Vincent Jeanbrun.

Après un nouveau vote, quatre des six vice-présidents ont été élus au premier tour: les Insoumises Nadège Abomangoli et Clémence Guetté, qui sera la première vice-présidente, la candidate d'Horizons et vice-présidente sortante Naïma Moutchou, et Xavier Breton (droite républicaine).

Au second tour, le ministre de l'industrie démissionnaire Roland Lescure et la députée LR Annie Genevard ont été élus, le RN ne parvenant pas à faire gagner ses deux vice-présidents sortants, Sébastien Chenu et Hélène Laporte.

Chantre d'une représentation équilibrée de chaque force politique dans les instances de l'Assemblée nationale, le groupe de Marine Le Pen avait annoncé qu'il voterait pour Mmes Abomangoli, Guetté, Moutchou, Laporte et MM. Breton et Chenu.

"Magouilles" dénoncées

"Toutes les forces politiques doivent être représentées au bureau", a souligné autour de minuit Mme Le Pen, dénonçant les "magouilles" des autres groupes qui se sont "accaparé l'intégralité des postes". Elle a annoncé que son groupe ne participerait pas à l'élection des secrétaires.

"Le RN avait perdu. Ce qu'il a cherché à faire là avec son pseudo-coup d'éclat", c'est "masquer le fait qu'ils sont perdants d'office, laisser entendre qu'il pourrait y avoir des retours d'ascenseur", a commenté la députée LFI Sarah Legrain.

Dans l'hémicycle, la macronie n'a pas manqué de relever ce soutien inattendu du RN à La France insoumise. "LFI étant élue avec les voix du Rassemblement national, ils pourraient au moins leur serrer la main", a lancé le ministre de l'intérieur démissionnaire Gérald Darmanin.

La macronie, qui avait en 2022 concédé deux vice-présidences au RN, dans le souci d'une représentation équitable des groupes, a cette fois-ci fait le choix de s'entendre avec la droite pour permettre l'élection de Yaël Braun-Pivet. Les deux camps briguant au passage un nombre de postes disproportionnés par rapport à leurs poids à l'Assemblée nationale.

"Matchs différents"

Le risque pour le camp présidentiel est de se mettre à dos l'ensemble des oppositions, en échange d'une alliance avec LR loin de lui assurer une majorité absolue, l'ensemble pesant 213 députés (contre 289 nécessaires).

Selon des sources concordantes, la droite demande également la commission des finances, qui se jouera samedi. Pour que ce poste revienne à la droite républicaine, il faudra que la majorité sortante prenne part au vote, ce qui est contraire aux usages. "Une honte", a dénoncé Manuel Bompard (LFI).

Pour le président français Emmanuel Macron, cette alliance pour le perchoir est le premier pas vers la constitution d'un gouvernement qui aurait le soutien de la droite, ce qui permettrait de doucher les espoirs de gouverner de la gauche.

Les responsables du Nouveau Front populaire semblaient toutefois ne pas vouloir renoncer vendredi. "Ce sont des matchs différents ([entre l'Assemblée et Matignon]. On est là, on continue et on y croit", a assuré la patronne des écologistes Marine Tondelier sur franceinfo.