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Les mégafeux sont-ils la bande-annonce des années à venir?

L’été dans l’hémisphère Nord a rarement été aussi brûlant. Eclairages.

La ville hawaïenne de Lahaina a été quasiment réduite en cendres par des mégafeux fulgurants en août dernier. © Keystone

8 septembre 2023 à 12:10

Temps de lecture : 1 min

Incendies » La forêt canadienne s’embrase et explose de couleurs rouge, or et orange depuis des mois. Un été indien précoce? Non, plutôt une saison en enfer pour les habitants, la faune et la flore. Jamais les flammes n’ont autant dévoré la forêt boréale. Sous l’effet du réchauffement de la planète, les mégafeux ont également fait des ravages sur le pourtour méditerranéen, à Hawaï ou aux Canaries. 

1. Quelle est l’ampleur de ces mégafeux?

Le Canada est le pays le plus touché par ces événements extrêmes. Plus de 16 millions d’hectares sont partis en fumée, soit la superficie de la Grèce, sept fois plus que la moyenne sur 40 ans. Une bonne partie du millier d’incendies en cours – sur les 6000 enregistrés en 2023 – reste hors de contrôle. «Tous ces feux qui brûlent un peu partout dans le pays, de la côte ouest à la côte est, c’est du jamais-vu!» soupire Marc-André Parisien.

Ce spécialiste en gestion de risque au Centre de foresterie du Nord, organisme fédéral basé à Edmonton (Alberta), n’a jamais observé un tel désastre à l’échelle du continent. Il mesure l’ampleur des dégâts: «Cette année, les feux ont ravagé deux fois plus de superficie à travers le pays que lors du précédent record de 1989 (7,6 milliards d’hectares). Il y en a moins qu’à cette époque, mais ils sont de plus grande taille et leur intensité augmente.»

Même sur les paradis tropicaux, les feux dantesques ne se reposent pas. Un brasier fulgurant a laissé un paysage de désolation sur l’île hawaïenne de Maui, il y a moins d’un mois. Les flammes ont détruit 80% de la ville de Lahaina et fait au moins 115 victimes. Des incendies ont été particulièrement spectaculaires près de Dubrovnik (Croatie), à Rhodes, à Tenerife, en Algérie, du côté d’Athènes ou encore en Sicile. «Le bilan est particulièrement lourd en Grèce», spécifie Dominique Morvan, professeur à l’Université d’Aix-Marseille en mécanique des fluides et spécialiste de la physique des feux. «Les surfaces brûlées (160 000 ha) y sont quatre fois plus importantes que la moyenne de 2006-2022.»

2. Pourquoi de tels incendies?

«Plus il y a de jours secs et venteux et plus la possibilité de feux est forte», constate Marc-André Parisien. «Au Canada, la météo est de plus en plus propice à la combustion avec une sécheresse plus longue et plus intense.» Les forêts de Maui sont aussi devenues hautement inflammables après avoir subi un stress hydrique soudain et sévère en juin. Sécheresse de longue durée, fort ensoleillement, vents soutenus, chaleurs record: un cocktail météorologique d’autant plus explosif dans les forêts canadiennes ou méditerranéennes qu’elles sont encombrées de combustibles tels que les herbes sèches et bois morts, victimes notamment des scolytes qui ont profité de la sécheresse au Canada pour proliférer. Il suffit d’un rien pour allumer la mèche.

Au Canada, la plupart du temps, c’est la foudre qui s’en charge. «Son action est bien corrélée avec les températures: s’il fait plus chaud, il y a plus de foudre et donc, plus de risques d’incendies», souligne Marc-André Parisien. La responsabilité de l’homme dans les départs de feux, qu’il soit incendiaire ou imprudent, a fait les gros titres en Algérie et en Grèce. «Dans la région méditerranéenne, 90% des déclenchements des incendies sont dus à l’activité humaine», évalue Dominique Morvan.

3. Quel est l’impact du changement climatique?

Une tendance lourde du réchauffement planétaire pèse sur les conditions de départ des feux de forêt: la modification de la pluviométrie. Le nombre de jours sans précipitations augmente et les pluies sont moins fréquentes, mais très intenses. D’où les risques accrus de période de sécheresse longue et sévère. Une étude publiée le 22 août dans le cadre du World Weather Attribution (WWA) révèle que la hausse des températures au niveau mondial a rendu sept fois plus probable le contexte de chaleur et de sécheresse qui a favorisé les incendies au Canada en 2023. En clair, chaque degré supplémentaire augmente la surface calcinée.

Le retour du phénomène El Niño a aussi contribué à la sécheresse du côté d’Hawaï. «Il pousse les eaux chaudes de surface du Pacifique d’ouest en est, avec pour conséquence des eaux plus froides à Hawaï, moins de précipitations et une végétation plus sèche», explique Dominique Morvan.

4. Les mégafeux vont-ils devenir la norme?

Les incendies géants ont sévi en Amérique du Nord, à Hawaï, sur le pourtour méditerranéen et même plus au sud, aux Canaries. «Ces mégafeux pourraient devenir la norme», estime Dominique Morvan. La puissance de ces brasiers dépasse très largement la capacité des moyens de lutte. Au point que les pompiers canadiens tentent moins de les éteindre que de limiter leur propagation avec pour priorité de préserver les vies humaines.

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