L’armée israélienne avance en terrain miné à Gaza

Guerre Israël-Hamas » L’armée israélienne disserte peu sur la stratégie militaire adoptée pour se débarrasser du Hamas dans la bande de Gaza. Elle préfère laisser parler les armes. Sous le feu des hélicoptères, des avions et des navires de guerre, chars et militaires au sol se chargent de mettre hors service l’organisation terroriste qui a tué près de 1200 personnes le 7 octobre. Après avoir pilonné la poche sans relâche, Tsahal a lancé une opération terrestre le 27 octobre. Réarticulée jour après jour en fonction des informations, l’offensive avance pas à pas sans destination finale ni calendrier. Jusqu’où ira-t-elle?

«Nous n’avons pas d’autres solutions que d’aller sur le terrain pour détruire le Hamas à Gaza.» Le colonel de réserve Gabi Siboni, chercheur à l’Institut de Jérusalem pour la stratégie et la sécurité, est catégorique: seule une opération terrestre permettra à Tsahal d’atteindre ses objectifs de guerre. «Nous avons besoin d’accéder aux quartiers généraux et aux infrastructures militaires souterraines du Hamas si nous voulons éliminer ses leaders, ses capacités militaires et gouvernementales, y compris en sous-sol.» Référence en particulier au quartier général qui serait creusé sous l’hôpital al-Chifa – principale cible de l’armée israélienne – qu’elle fouille actuellement. L’établissement servirait de paravent aux activités opérationnelles et de renseignement de l’organisation.

A une offensive terrestre d’envergure, Israël a préféré une avancée méthodique, étape par étape, entre raids blindés et incursions de commandos accompagnés de frappes terrestres et aériennes ciblées. De quoi limiter les pertes militaires de Tsahal. «Pour l’instant, elle utilise la bonne méthode», observe le général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU. «Elle doit éviter d’entrer dans des combats de rue qui dureraient trop longtemps, comme le voudrait le Hamas, au risque de s’enliser.»

Selon le général français, il était rationnel de couper en deux la bande de Gaza en une zone de combat au nord, considérée comme le centre de gravité du Hamas, et une zone de refuge au sud. Tsahal vide le nord de sa population pour ne pas avoir à détruire le Hamas au milieu de 2,4 millions d’habitants avec de plus lourdes pertes civiles à son bilan (plus de 11’500 morts à Gaza jusque-là). «Mais si elle veut attirer plus de monde au sud, elle ne doit pas bombarder cette partie du territoire où ils sont censés être protégés et elle doit y laisser entrer toute l’aide humanitaire possible», nuance Dominique Trinquand.

Les forces israéliennes avancent en terrain miné à Gaza. Sous leurs pieds courent plus de 500 km de galeries imbriquées dans l’infrastructure urbaine. Un réseau complexe de tunnels creusés depuis une vingtaine d’années par le Hamas et dans lequel il se retranche. Le mouvement islamiste a l’avantage: le défenseur est en position de force dans une guerre asymétrique en zone urbaine. Pour arracher en 2017 la ville irakienne de Mossoul des mains de 3000 à 5000 combattants du groupe Etat islamique (EI), il a fallu neuf mois et 100’000 soldats…

Ces tunnels sont d’autant plus un casse-tête que les quelque 240 otages y sont probablement retenus par le Hamas pour servir de boucliers humains. De quoi limiter la capacité d’action de Tsahal. «Nous ferons de notre mieux pour sauver tous les otages, assure Gabi Siboni. Personne ne peut garantir un succès total car les terroristes du Hamas peuvent éventuellement leur nuire.»