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Scènes

Critique. Eric Bulliard revisite les personnages de Suzanne et Figaro sur le ton de la confidence

«Si c’est un garçon, on l’appelle Figaro» se joue au Théâtre des Osses encore tout le mois de mars. Le duo réunit Caroline Gasser et Yann Pugin sous la direction d’Anne Schwaller.

Le public entoure les comédiens, comme s’il était assis dans un salon feutré. © © Dimitri Känel

25 février 2024 à 13:55

Temps de lecture : 1 min

Si c’était une sonate, cela commencerait largo. Dans la solitude de l’automne de la vie, quand le dos se voûte, les pas deviennent hésitants. Yann Pugin vit en retraité intérieurement pas si paisible. C’est la première image de Si c’est un garçon, on l’appelle Figaro, troisième épisode de la trilogie Figaro, à voir au «studio», au dernier étage du bâtiment du Théâtre des Osses, comme si nous, le public, étions confortablement installés dans son salon tamisé.

Il se prépare une tisane, lutte anodine, quotidienne, concrète. Ce théâtre-là n’affiche pas d’élan vainqueur, de posture intellectuelle éclatante, de style démonstratif en étendard. Immédiatement, on ressent de l’empathie pour cet homme-là, il pourrait être notre père, un oncle, quelqu’un qui fut imposant mais que les années ont tassé.

Quand Caroline Gasser entre en jeu, sa classe et sa présence illuminent l’espace. Les mots s’animent. Andante. Il leur faut du temps pour se rapprivoiser, refaire un pas de danse, on comprend qu’ils se sont perdus de vue, sans que les blessures aient cicatrisé. Par moments – et c’est touchant – le récit au discours indirect, que les deux comédiens prennent tour à tour en charge, complète, nuance ce qu’ils disent à voix haute, raccommode les ellipses. On découvre toute une vie intérieure insoupçonnée sous la façade des meubles démodés. Peut-on recommencer? Non, bien sûr, trop de temps a passé.

La musique de la vie

Mais quand ils relisent les rôles – ceux de Suzanne et Figaro – qu’ils ont joués il y a longtemps, sur un air des Noces de Mozart, elle réussit à ranimer sa flamme à lui. Allegro. Ils ont été comédiens, le théâtre les a fait vivre, vibrer. C’est le théâtre qui leur fait retrouver cette plus que vie. Là où une communion des âmes est possible. Là où le sens de la vie, les visions du monde, les soifs de liberté et les désillusions se confrontent.

Eric Bulliard, dans cette pièce en création dont il est l’auteur, questionne, comme une mise en abyme, le rôle du théâtre. La réponse est intime à chacun, comme ce spectacle est intimiste. Il laisse le spectateur entrer dans les interstices du texte, sans déclamation grandiloquente, loin de la profession de foi tapageuse. Mais dans une manière délicate de relier trajectoires personnelles et sentiment d’une humanité partagée.

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