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DJ Shadow revient aux sources de son art avec Action Adventure

Le producteur californien DJ Shadow sort un nouveau disque instrumental qui renoue avec l’esprit pionnier de ses débuts, lui qui depuis 30 ans murmure à l’oreille des superstars.


27 octobre 2023 à 18:10

Musique » Pour peu on croirait à une malédiction. On a coutume de dire qu’il est presque impossible pour un artiste de survivre à un premier album porté aux nues par la critique. C’est paradoxal, mais c’est souvent le cas. Le DJ américain Josh Davis, alias DJ Shadow, en sait quelque chose, lui qui était encensé à la sortie de son premier album Endtroducing, en 1996.

Dans son cas, les planètes étaient alignées: la vague trip hop avait déjà commencé à enivrer le public avec ses tempos pesants et ses ambiances métissées et le hip-hop devenait la bande-son remuante et inventive d’une nouvelle génération. Des titres tels que l’éthéré Midnight in a Perfect World ou l’entêtant Organ Donor captaient instantanément le Zeitgeist.

Faute d’une étiquette disponible pour décrire cette musique empilant samples et break beats comme nulle autre auparavant, on a rangé DJ Shadow, par commodité ou peut-être par paresse, dans la case «abstract hip-hop». Une musique instrumentale qui célébrait enfin les racines communes du rap et de la musique électronique et utilisant en plein les nouvelles possibilités offertes par les machines (platines, samplers, séquenceurs, etc.). Pour la petite histoire, cet Endtroducing matriciel figure même au Guiness Book des records comme le premier album entièrement composé avec des samples.

Retour aux sources

Et puis plus rien… Il a fallu attendre six ans pour que le Californien remette la compresse avec The Private Press, une suite tardive, publiée en 2002 dans un paysage musical totalement remanié. Malgré l’excellent single Six Days au potentiel commercial évident et bénéficiant d’un clip réalisé par le légendaire cinéaste hongkongais Wong Kar-wai, DJ Shadow quitte le devant de la scène.

Dans une décennie 2000 où les rythmes dansants des Neptunes et de Timbaland dictent leur loi jusque dans les hautes sphères du mainstream (Britney Spears, Madonna, Justin Timberlake), Josh Davis, avec son obsession pour les boucles poussiéreuses déterrées des entrailles des plus obscurs disquaires de la Bay Area, fait figure d’anachronisme. C’est donc dans l’ombre qu’il s’épanouira désormais. Un retour en arrière? Non, un retour aux sources.

Si DJ Shadow a marqué de manière indélébile le milieu des années 1990, il cultive son art depuis bien plus longtemps. Dans les années 1980, alors qu’il est encore à l’école à San Jose dans la périphérie de San Francisco, Josh Davis expérimente avec un petit enregistreur quatre pistes. En 1989, à l’Université de Davis dans le nord de la Californie, DJ Shadow officie comme programmateur au sein de la station de radio de son campus KDVS.

C’est à cette époque que ses productions sont repérées par le label britannique Mo’Wax, fondé par James Lavelle, qui sort plusieurs singles aux accents funk, rock, hip-hop et jazz. En parallèle, DJ Shadow monte sa propre structure Solesides afin de sortir les disques de ses amis rappeurs Blackalicious et Latyrx, des figures révérées de l’underground qui trouveront quelques années plus tard un écho auprès du grand public à l’instar de leur mentor.

Un rat de studio

Ces fondations solides et l’esprit pionnier du disc jockey lui ont ouvert les portes de l’industrie musicale. Alors que tout le monde semble l’avoir oublié dans les années 2000, il revient là où on ne l’attend pas. D’abord en cultivant l’art éminemment technique du turntablism (l’art de créer de la musique avec des platines vinyles ou «platinisme» en bon français) sur des albums de plus en plus complexes (The Outsider, 2006, The Mountain Will Fall, 2016, Our Pathetic Age, 2019).

On retrouve aussi Shadow à la barre du projet UNKLE avec le boss de son label James Lavelle. Le carnet d’adresses bien garni de ce dernier suffit à faire naître des collaborations musicales avec des pointures telles que Thom Yorke de Radiohead, les Beastie Boys, Richard Ashcroft de The Verve, Jason Newstead de Metallica ou plus étonnamment encore Depeche Mode (le remix de leur titre Painkiller).

«Je peux honnêtement dire que je n’aurais pas pu faire ces titres il y a seulement quelques années»
DJ Shadow

Loin des projecteurs mais indécollable des studios d’enregistrement, Josh Davis a ainsi prêté sa science du découpage des samples et de la programmation de percussions aux artistes internationaux les plus aventureux. En dresser la liste serait fastidieux mais on peut citer des groupes d’univers très différents tels que Rage Against The Machine ou encore tout récemment les Australiens de King Gizzard & The Lizard Wizard, sans oublier tout ce que la planète hip-hop compte de jeunes loups et de vieilles gloires (De La Soul, Nas, Clams Casino, Wiki ou Run The Jewels).

Un album éclectique

C’est donc avec une certaine surprise que l’on découvre le contenu du nouvel album de DJ Shadow Action Adventure. Pas un seul invité à l’horizon. «Je suis vraiment excité à propos de cet album. Il y a 14 titres, et tous sauf un sont instrumentaux. Par définition, cela le rapproche d’Endtroducing et de The Private Press en termes de personnalité et de feeling, mais ce n’est pas un retour en arrière. Les chansons représentent mon évolution continue en tant que producteur et compositeur, et je peux honnêtement dire que je n’aurais pas pu faire ces titres il y a seulement quelques années», écrit le musicien dans une note d’intention publiée sur son Bandcamp.

A l’écoute de cet album éclectique, on ressent l’envie du DJ de se faire plaisir, sans s’imposer de carcan. Le break beat d’Ozone Scraper est rehaussé de synthétiseurs qu’on jurerait sortis d’un film des années 1980. Tandis que You Played Me calme le tempo et se joue malicieusement des codes kitsch d’un funk d’antan autour d’un sample vocal ralenti de Jan Jerome (Baby, Got Me Goin). Une fois de plus DJ Shadow surgit de l’ombre là où personne ne l’attend.

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