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Culture

La sculptrice française Germaine Richier racontée en BD

Laurence Durieu et Olivia Sautreuil racontent en bande dessinée la sculptrice française Germaine Richier, qui a bouleversé son art


Raphaël Kadishi

Raphaël Kadishi

6 avril 2023 à 22:15

Beaux-arts » Jeune ou vieux, musclé ou bedonnant, féminin ou masculin: il semble que Germaine Richier trouvait tous les corps beaux. Qu’elle faisait émerger l’humanité de ses sculptures. Qu’elle puisait dans la nature une fraternité avec toutes les créatures, même avec des insectes rarement appréciés ou des racines biscornues. Et la bande dessinée que Laurence Durieu et Olivia Sautreuil lui consacrent, Germaine Richier, la femme sculpture, saisit parfaitement ce lien puissant tissé entre cette créatrice ayant bouleversé son art et ses œuvres.

Les dessins d’Olivia Sautreuil transmettent cette force, surtout quand elle fait exploser les cases et que ses illustrations gagnent des pages entières. Le noir et blanc taillent son discours à l’essentiel. Des touches de couleurs ne sont ajoutées que dans les ultièmes pages de l’ouvrage, afin de souligner la pratique de l’artiste peignant alors ses sculptures.

Elle puisait dans la nature une fraternité avec toutes les créatures

Les illustrations frappent juste. Mais on peut également faire confiance à Laurence Durieu pour l’exactitude du scénario. La journaliste est la petite-nièce de Germaine Richier, elle a rédigé une biographie de la sculptrice sortie récemment et elle écrit un film documentaire sur le même sujet. De plus, la BD, qui se lit d’une traite, est éditée par Bayard en collaboration avec le Centre Pompidou, à Paris, qui accueille actuellement une rétrospective en hommage à l’artiste décédée en 1959. Alors que la nature n’a jamais été aussi présente dans les débats et l’actualité, se (re) plonger dans le travail de la Française née en 1902 semble essentiel.

Evidemment on admirera le parcours de cette femme dans un monde très masculin alors qu’elle ne baigne pas dans le milieu de l’art. Elle a grandi près de Montpellier, elle vient d’une famille vivant du blé et de l’huile d’olive. Pourtant son envie de sculpture emporte tout. Elle arrive à devenir l’élève de Bourdelle, à créer son propre style. Son talent est reconnu de son vivant. Elle ne se laisse pas classer dans un genre (un de ces -ismes privant de liberté). Elle ne suit pas le mouvement, elle le précède. Trop vite parfois, comme son Christ d’Assy, réalisé pour l’église Notre-Dame-de-Toute-Grâce, si humain qu’il en a choqué des catholiques intégristes. Le scandale est énorme, l’œuvre est retirée. Elle réintègre l’édifice en 1969 et est désormais classé Monument historique…

Années suisses

La sculptrice a aussi des liens avec la Suisse. Son premier mari, Otto Bänninger, qui a travaillé dans l’atelier de Bourdelle, était Zurichois. Ils se trouvaient tout deux dans notre pays en 1939 quand la guerre a été déclarée entre la France et l’Allemagne. Germaine Richier y est restée le temps du conflit, y a travaillé, y a enseigné aussi. Elle ne pouvait qu’intégrer l’horreur à son œuvre. Son Juin 40 l’incarne ainsi dans une sculpture d’homme nu. «Il a comme une béance sur le front… On entend presque un cri….» observe un élève au détour d’une case de cette bande dessinée complétée par un lexique. Mais la lecture de Germaine Richier, la femme sculpture donne surtout envie de voir ses œuvres dont certaines se trouvent en Suisse. On pourra par exemple immédiatement en découvrir quelques-unes sur la galerie online du Kunsthaus de Zurich en attendant de les apprécier en chair et en bronze.

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