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Libres comme l'art

«Viva la muerte», le poème sulfureux de Fernando Arrabal, réapparaît

Avec «Viva la muerte», œuvre dérangeante, l’artiste espagnol Fernando Arrabal a longtemps fâché les censeurs. Ce film maudit refait surface aujourd’hui en Blu-ray. A réserver à un public averti.

En 2021, la cinémathèque de Toulouse décide de restaurer le film en 4k. © Editions Montparnasse

29 décembre 2023 à 12:00

Temps de lecture : 1 min

Cinéma » «Je suis un peintre raté, un mathématicien raté, un musicien raté. Dans tous ces domaines, j’ai cependant beaucoup travaillé, et ça m’a donné des connaissances confuses qui vont m’aider: mon film sera un film confus, comme la vie, comme la nature…» Début 1970, Fernando Arrabal est survolté, plein de doutes mais conscient que ses premiers pas dans le cinéma n’auront rien de conventionnel. Le poète et dramaturge reconnu se prépare à tourner Viva la muerte, adaptation de Baal Babylone, roman semi-autobiographique dans lequel il relate une enfance volée durant la guerre civile espagnole.

Arrabal, qui a vu le jour à Melilla (exclave espagnole sur la côte nord de l’Afrique) en 1932, vit à Paris depuis 1955 mais après une dédicace à Madrid en 1967, il n’a pu s’empêcher de provoquer le régime en place. Emprisonné durant plusieurs mois, il a été libéré grâce aux actions d’écrivains tels que François Mauriac, Samuel Beckett et Arthur Miller. Désormais persona non grata dans son pays, l’artiste a obtenu des fonds en France et en Tunisie. C’est là, dans la ville côtière d’Hergla, que démarre le tournage de l’un des films les plus controversés de l’histoire du cinéma.

On siffle, on vomit

Le drame de Fando, un jeune garçon qui se réfugie dans des fantasmes morbides, nécrophiles et sexuels extrêmes après avoir découvert que sa mère a «vendu» son père républicain aux franquistes, défie les gardiens de l’ordre moral. Tétanisée par ce flot d’images démentes, la Tunisie censure illico le long-métrage dont elle avait favorisé le tournage. En France, la commission de contrôle des films demande son interdiction totale par 18 voix contre quatre. Dans un premier temps, il est décidé que Viva la muerte ne sortira pas dans les salles françaises. L’Espagne, qui, on s’en doute, a censuré l’ouvrage sans même avoir eu besoin de le visionner, approuve.

Quelqu’un a dit un jour qu’Arrabal était un mélange entre le marquis de Sade et saint François d’Assise

Toutefois, en dernière minute, Arrabal est autorisé à montrer son film au Festival de Cannes en 1971. Sur la Croisette, on siffle, on vomit. On applaudit parfois aussi: John Lennon hurle au chef-d’œuvre, Pablo Picasso charge Luis Buñuel de porter un cadeau à son compatriote, tandis que l’éminent journaliste Claude Mauriac (fils de François) écrit: «Aucun plan, même atroce, qui soit gratuit. Il n’y a pas, chez Arrabal, la moindre arrière-pensée de provocation. Le seul scandale, ici, est celui de la vérité. 

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