Le mot de la fin » Vous vous souvenez du jour où cette voisine a cessé de cueillir ses pommes? Vous ne vous en êtes peut-être pas aperçu tout de suite et puis soudain, vous vous êtes fait la réflexion: tiens, elle n’est pas descendue au pré cette année. Ni l’année dernière en fait, ou si c’était déjà la précédente? Difficile à dire. Idem pour ce vieux monsieur qui n’a jamais raté un 1er Août, ça fait combien de temps au juste qu’il n’y a plus de fanions à son balcon? Quand est-ce qu’elle a cessé de se teindre les cheveux ou de faire ses courses seule?
C’est arrivé tout à coup. Du jour au lendemain, ils sont devenus vieux. On a voulu vous faire croire que la vieillesse s’installait doucement, cornant peu à peu les pages de votre existence. Sottises, la vieillesse est une maladie foudroyante. Une foudre qui peut s’abattre à tout âge. Il y a bien sûr des terrains plus conducteurs que d’autres: les crêtes d’un chagrin, la moiteur d’un deuil ou encore les plaines rases de la solitude où se dressent, menaçantes, les cimes de l’ennui.
La vieillesse est une maladie foudroyante
Du jour au lendemain, l’ordonnance s’allonge et les nuits raccourcissent. L’instant d’après, on ne prend plus la peine de ranger les médicaments dans l’armoire à pharmacie. Ils commencent à envahir la table de la cuisine, entre deux piles de journaux et quelques factures oubliées ne laissant bientôt plus qu’un minuscule rectangle dévolu au repassage. Un jour le fer à repasser vous lâche et vous ne le remplacez pas. L’instant d’après, vous cessez de laver vos rideaux. Vous passez la nappe à la machine et vous vous dites qu’au fond, c’est tout aussi bien sans. Vous la rangez avec le fer à bricelets jusqu’à la prochaine bénichon. L’instant d’après, il n’y a plus de bénichon. Au fond, les enfants sont grands, la cuisine un peu petite et de toute façon, vous détestez les cuquettes.
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