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Suisse

Revente manquée de 96 chars Léopard 1. trois enquêtes vont se pencher sur Ruag

Dans la foulée, Ruag a annoncé le lancement de sa propre enquête externe


23 août 2023 à 00:39

Matériel de guerre » Lorsque Viola Amherd s’est cassé le coude il y a un mois, sans doute n’imaginait-elle pas que sa rentrée politique allait être à l’image de sa balade dans les montagnes valaisannes, à savoir glissante et périlleuse. La voilà en tout cas embarquée dans une affaire aussi étrange qu’embarrassante, celle de la revente manquée par Ruag de 96 chars Léopard 1. Une affaire qui s’imbrique elle-même dans une autre affaire, le départ précipité il y a deux semaines de la directrice Brigitte Beck de ce groupe d’armement aux mains de la Confédération, après des déclarations maladroites ce printemps sur les exportations d’armes suisses vers l’Ukraine. Tout cela sur fond de respect du principe de neutralité.

Sommée de s’expliquer devant la commission de sécurité du National, qui se réunissait ces deux derniers jours, la ministre de la Défense a dévié le tir en annonçant l’ouverture d’une enquête externe chargée de faire la lumière sur cette affaire. Et dans la foulée, Ruag a annoncé le lancement de sa propre enquête externe. Si l’on y ajoute l’examen lancé par la sous-commission de gestion du Conseil des Etats des faits qui ont conduit au départ de Brigitte Beck, cela porte à trois le nombre d’enquêtes qui seront menées en parallèle sur Ruag.

Stationnés en Italie

Le début de cette histoire remonte à 2016, soit bien avant l’éclatement de la guerre en Ukraine. Le groupe Ruag acquiert alors 96 chars d’assaut de type Léopard 1, stationnés en Italie. Ils ont été achetés comme marchandises commerciales et pour fournir des pièces de rechange. Le problème, c’est que, de l’aveu même de l’entreprise, seules 10% des pièces sont compatibles avec le Léopard 2, dont est équipée l’armée suisse.

Au début de cette année, l’entreprise allemande Rheinmetall manifeste son intérêt pour l’achat de ces 96 blindés, dans l’objectif confessé de les livrer à l’Ukraine. Le 13 février, un contrat de vente est signé. Il inclut juste une réserve stipulant que la livraison ne se fera qu’avec l’accord des autorités compétentes.

Et le 28 juin tombe la décision du Conseil fédéral: c’est niet! Cette vente est jugée contraire au droit sur les exportations d’armes et viole donc, de l’avis du gouvernement, le principe de neutralité.

La goutte d’eau

Devant la commission de sécurité du National, Viola Amherd a expliqué n’avoir été mise au courant de la transaction qu’au moment de la demande de validation par le Conseil fédéral. Et c’est ce dimanche seulement que la centriste aurait appris un autre élément troublant, à savoir qu’une entreprise allemande, non spécifiée, réclame la propriété sur 25 des 96 chars, résultant d’un contrat antérieur.

«Viola Amherd est comme un chat qui retombe toujours sur ses pattes»
Jean-Luc Addor

C’est, semble-t-il, la goutte d’eau qui a incité la ministre de la Défense à diligenter une enquête externe. Aux yeux de Jean-Luc Addor, la manœuvre est habile: «Viola Amherd est comme un chat qui retombe toujours sur ses pattes», compare son compatriote valaisan.

Très critique, le parlementaire UDC lâche: «Brigitte Beck, c’est le fusible qui a sauté pour sauver la conseillère fédérale.» Il doute de la version présentée. «Mais si elle n’était effectivement pas au courant plus tôt», ajoute-t-il, «c’est pire, car cela veut dire qu’elle ne se donne pas les moyens de savoir ce qui se passe à l’intérieur de son département.»

Une stratégie cachée

Jean-Luc Addor émet un autre soupçon: «On a l’impression qu’il y a de la part de Viola Amherd une stratégie visant une adhésion rampante à l’Otan.» C’est dans ce cadre qu’il comprend les propos du président du conseil d’administration de Ruag, Nicolas Perrin, dans la Neue Zürcher Zeitung de samedi dernier, pour qui une décision sur l’adhésion de la Suisse à l’Otan est inévitable. Pour le Valaisan, «une sérieuse reprise en main de Ruag est nécessaire».

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