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Suisse

La canicule profite au vol ibre

La canicule est favorable aux parapentistes, planeurs, avions et autres utilisateurs du ciel avec les courants ascendants qui remontent plus avec l'isotherme. 

Ein Haengegleiter fliegt vor der Bergkette mit Eiger, Moench und Jungfrau, nach seinem Start auf dem Weissenstein, am Donnerstag, 1. August 2019. (KEYSTONE/Peter Klaunzer)PETER KLAUNZER/© KEYSTONE / PETER KLAUNZER

Raphaël Kadishi

Raphaël Kadishi

23 août 2023 à 21:38

Temps de lecture : 1 min

Parapente » La canicule on la ressent, on en souffre et parfois, on en profite. C’est le cas des amateurs de parapente, à qui les conditions météorologiques et aérologiques de ces derniers jours donnent des ailes. Poussés par les courants ascendants, ces derniers atteignent littéralement des sommets autour desquels la prudence est de mise lorsque parapentistes, deltaplanes, planeurs et petits avions partagent un même espace aérien.

«Le week-end passé, des connaissances d’une école valaisanne ont pu survoler le Cervin en parapente. Un pilote du coin qui a décollé du Niesen et atterri à Villeneuve a titillé les 3800 mètres. Ici en Gruyère, on a fait des vols à 3500 m alors que le plafond se situe plutôt autour des 2500 m lorsque la météo est standard», rapporte Marc Pugin. Instructeur et responsable de Gruyère Parapente, il vole depuis plus de vingt ans. «Les périodes de canicule offrent des conditions aérologiques positives pour les parapentistes. De mémoire, la première canicule qui nous a permis de voler si haut était en 2003. Depuis, la fréquence de ces conditions exceptionnelles a tendance à augmenter avec le réchauffement climatique.» En 2019, profitant de la canicule, 150 parapentistes avaient notamment atteint le toit de l’Europe en se posant au sommet du Mont-Blanc.

Thermiques bleues

«Ces jours-ci, nous sommes sous un anticyclone à très large échelle accompagné d’air chaud venant du sud-ouest de l’Europe et de l’Afrique. Ces différents facteurs favorisent un air instable et sec, qui se réchauffe au sol et monte jusqu’à une altitude élevée sans former de nuages. On parle alors de thermiques bleues», explique Mikhaël Schwander, météorologue à MétéoSuisse.

«Des connaissances d’une école valaisanne ont pu survoler le Cervin en parapente»
Marc Pugin

Un air chaud, sec et instable: la formule magique pour jongler avec les courants d’air. De quoi consteller le ciel bleu de voiles colorées. «Il y en a un paquet, un monde fou, c’est impressionnant», lâche Jacky Lebreau, instructeur et pilote de planeur vaudois, les yeux rivés sur une application qui piste les aéronefs. «Au moment où je vous parle (lundi après-midi, ndlr), rien que sur le Jura entre Yverdon et Soleure, il y a 15 parapentistes. Entre Zurich et Aoste, il y en a une centaine», compte le passionné. Et de préciser que ces conditions sont également idéales pour les planeurs en vantant les exploits d’un camarade de club. «Il est parti du col des Mosses, a volé jusqu’au Tessin, est passé près du Mont-Rose et du Petit-Combin avant de tourner au sud de Grenoble et de traverser le lac Léman pour rentrer au champ d’aviation de Montricher.»

Pilote d’avion, Quentin Monney est aux premières loges pour observer ce trafic aérien. Au départ de l’aérodrome d’Ecuvillens, il a l’habitude de croiser, dans les airs, les amateurs de vol libre. Ces derniers jours pourtant, il doit être particulièrement vigilant. «Je n’ai jamais vu ça, c’est assez fou. Tout le monde est dans toutes les couches et on doit presque zigzaguer entre les uns et les autres», s’étonne-t-il. Et d’ajouter: «L’avion vole à 200 km/h, les planeurs à 100 km/h et les parapentes à 30 km/h. C’est donc à l’avion de faire les manœuvres d’évitement. Ce sont des gestes standards, mais j’ai dû en faire beaucoup ce week-end. On parle de vol libre, donc par définition, on ne sait pas où ils sont.»

Voir et être vu

«On doit presque zigzaguer entre les uns et les autres»
Quentin Monney

Si les parapentistes flirtent avec le rêve d’Icare en volant à des altitudes inattendues, ces performances respectent toutefois le cadre légal. L’espace aérien pour le vol libre est l’espace G et E, dans lequel il n’y a pas d’aviation commerciale. Par contre, les petits avions motorisés privés et les avions militaires peuvent y passer. La base légale ici et celle du see and avoid. Cela signifie que les différents aéronefs ont la responsabilité de «voir et d’être vus», rappelle la Fédération suisse de vol libre (FSVL) en précisant que «cela fonctionne très bien et que les presque-collisions sont extrêmement rares». L’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC) juge également que cette règle est «adaptée compte tenu de la vitesse à laquelle volent les parapentes ainsi qu’aux couleurs vives de leur voile.»

Pour plus de sécurité, certains parapentistes s’équipent, en outre, d’un système anticollision. «Il s’agit d’un petit appareil que l’on ajoute sur les altimètres et qui émet un signal perçu par les avions et hélicoptères équipés d’un récepteur adapté. Ce n’est pas obligatoire, mais ça se répand», témoigne Marc Pugin. Côté santé, et contrairement à certains pilotes de planeurs, les parapentistes qui s’aventurent à ces altitudes ne risquent pas de manquer d’oxygène, et encore moins de souffrir du froid. «Dans la nuit de dimanche à lundi, l’isotherme du zéro degré a été mesurée à 5298 m», rappelle Mikhaël Schwander.


Quatre questions à Christian Boppart

Directeur de la Fédération suisse de vol libre (FSVL), Christian Boppart revient sur l'aspect sécuritaire des vols en parapente et les questions de formation.

Avec l’augmentation des vols libres et des altitudes atteintes, est-ce que le nombre d’accidents augmente également?

Christian Boppart: Comme il n’y a aucune obligation d’annoncer les accidents, nous ne disposons pas de chiffres officiels et complets. Je peux en revanche vous répondre de manière purement théorique. S’il y a plus de vols, il devrait y avoir plus d’accidents. Mais rien n’indique que l’augmentation serait disproportionnée. En ce qui concerne les vols à haute altitude avec les conditions actuelles, nous n’avons pas d’indicateurs d’une augmentation des accidents. De manière générale, nous encourageons les membres à annoncer les accidents afin d’avoir une vue d’ensemble. Cela nous permet de détecter les tendances et d’améliorer, si nécessaire, la formation.

Parmi les accidents de parapente, est-ce qu’il y a beaucoup de collisions avec d’autres aéronefs?

Les collisions sont très rares. A notre connaissance et selon nos estimations, une par an en moyenne. La plupart des accidents se produisent après le décollage ou avant l’atterrissage. Tout simplement parce que lorsque la distance avec le sol est faible, les pilotes ont moins de temps pour réagir et ouvrir un parachute de secours.

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