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Athlétisme

Le grand chelem de la «dure au mal»

De mammographie en prothèse de hanche, Monique Brodard a terminé les six plus grands marathons

Monique Brodard, Fribourgeoise de Rossens qui a terminé les 6 plus grands marathons du monde Photo Lib/Charly Rappo, Rossens, 22.10.2021Charly Rappo/Charly Rappo / La Liberté

5 novembre 2021 à 17:21

Temps de lecture : 1 min

Course à pied » «Je ne veux pas me vanter»: une phrase qu’elle prononcera plusieurs fois, ce matin-là. Par souci d’humilité donc, Monique Brodard a jugé qu’il n’était pas nécessaire qu’elle pose pour la photo avec sa médaille. Une médaille, une de plus, pour la marathonienne de Rossens qui, et son mérite n’en est que plus grand, a découvert la course à pied il y a 26 ans, alors qu’elle en avait déjà 39. Sauf que la breloque qu’elle n’a pas autour de son cou n’est pas n’importe laquelle. Elle est l’affirmation d’un caractère fort, le témoin d’une passion née sur le tard mais assouvie avec un appétit rare. La preuve, enfin, que Monique Brodard, en plus d’un sens aiguisé de la formule et de la repartie, a de la suite dans les idées, elle qui, le 3 octobre à Londres, jour de Morat-Fribourg, a bouclé en un peu plus de 4 heures le dernier Major qui manquait à son palmarès.

Car comme le tennis ou le golf, la distance reine de l’athlétisme a son «grand chelem», ces 42,195 km qui, pour des raisons le plus souvent historiques, sont un peu plus gratifiants que les autres. Berlin, Boston, Chicago, Tokyo, Londres et New York, qui a lieu ce dimanche: ils sont au nombre de six et forment l’Abbott World Marathon Majors. Au cercle fermé auquel elle appartient depuis peu, Monique Brodard n’a jamais rêvé d’appartenir. «Les deux premiers, c’était un peu du hasard, et le troisième, je l’ai fait avec un groupe issu du club de Farvagny. Arrivée au quatrième, je me suis soudain dit qu’il n’en restait plus que deux et qu’il serait dommage de s’arrêter là», explique celle qui, de fil en aiguille et de mammographie en coups de bistouri, s’est prise au jeu.

La Coop de Villars

42,195

kilomètres. La longueur d’un marathon

Si courir a toujours été un plaisir et le restera encore longtemps, la vie, à l’image du goudron sur lequel elle a laissé une partie de son bassin, n’a pas toujours été tendre avec la jeune retraitée de 65 ans. Une semaine après avoir atteint le Graal sur les bords de la Tamise, ne se faisait-elle pas poser une prothèse de hanche? «Une opération prévue de longue date qui m’obligera à rester tranquille jusqu’à la fin de l’année. Mais, déjà, ça va tout bien», précise-t-elle. Et d’ajouter, les anciennes béquilles de son mari Yves posées à côté d’elle: «Quand je retournerai courir, je ne ferai pas 42 km, on est d’accord. J’irai plutôt à la piste finlandaise de la Coop de Villars-sur-Glâne. Tranquille. Je sais que l’on recommence tout en bas et qu’il faut entre 4 et 6 semaines pour retrouver un tant soit peu son niveau.»

Le plus beau de tous

Monique Brodard parle en connaissance de cause. Son premier marathon, celui de New York en 2006, aurait dû être une fête et il l’a été. Mais le retour de bâton du destin aurait pu la laisser blême et blette au milieu de l’océan Atlantique, entre la «Grosse Pomme» et l’Hôpital fribourgeois. «Le 5 novembre, je courais à New York, qui est pour moi le plus beau marathon de tous. En plus, et je ne veux pas me vanter, j’avais fini en 3h40, ce qui, à 50 ans, n’était pas si mal, je crois. Bref, le 5 j’étais sur mon petit nuage, mais le 21 je me faisais enlever une tumeur dont j’ignorais l’existence avant de partir. Autant dire que je suis redescendue de ce même nuage à vitesse grand V! C’est comme si on m’avait poussé du haut du Cervin», raconte-t-elle avant d’ouvrir une de ses nombreuses parenthèses: «Il faut dire que j’ai eu beaucoup de chance dans mon malheur, car le cancer a été diagnostiqué très tôt. Je n’ai pas eu besoin de chimiothérapie et, physiquement, je n’ai jamais véritablement souffert. Mais la tête a quand même dû encaisser le choc…»

Pour la deuxième fois

Sensible mais dure au mal – «c’est de famille, car mon frère est comme moi» –, Monique Brodard n’a jamais renoncé, si ce n’est à s’apitoyer sur son sort. «En sortant de la radiothérapie à l’HFR, j’allais me changer aux toilettes et je partais m’entraîner avec des amies, reprend-elle. A l’époque, je travaillais à la Direction de l’instruction publique. On m’avait mis à l’assurance pendant trois mois, mais j’avais dit à ma cheffe que je continuais à courir. Elle m’avait fait comprendre que je pouvais faire autant de sport que je voulais, car sans doute savait-elle à quel point cela me faisait du bien au moral.»

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