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Axel Wittwer et les cabossés de la vie

Les mains dans les cambouis et la tête dans les nuages, Axel Wittwer vit pour et dans ses 100 véhicules

Axel Wittwer vit dans ses vieilles voitures, qu'il rénove jour et nuit Photo Lib/Alain Wicht, Vallon le 30.03.2023Alain Wicht/Alain Wicht/La Liberté

Mélanie Gobet

Mélanie Gobet

15 avril 2023 à 19:09

Broye» Dans le spacieux atelier du rez-de-chaussée, des outils parfaitement alignés et un modeste garde-manger trahissent la présence d’un infatigable et perfectionniste bricoleur. Passez votre chemin, c’est à l’étage que se cache le trésor de la Pacotte, concept derrière les deux vieilles bâtisses contiguës de Granges-près-Marnand. Emboîtées «à la Tetris» sous un toit rénové à coups de 11 500 tuiles et à la force de deux mains seulement, des dizaines de voitures d’un autre temps, achetées dans toute la Suisse et au-delà, transpirent la rouille. «Il m’en reste 100, mais j’en ai eu 211 au total. Ce que j’aime le plus, ce sont les véhicules datant d’avant la Seconde Guerre mondiale jamais restaurés, encore dans leur jus.» Axel Wittwer, propriétaire des lieux et de la collection, qui comprend également boguets et scooters, a la mémoire des chiffres et des dates.

«J’aime les vieilles machines, les vieux objets: autant de choses qui intéressent peu de monde»
Axel Wittwer

Malgré ça, quatre années marquantes sont gravées sur son cou, autour duquel un traitillé invite un ciseau, lui aussi tatoué, à terminer le boulot commencé par 15 individus, un soir d’automne 2008. «Ils m’ont passé à tabac et laissé pour mort sans que je sache pourquoi. De la violence gratuite.» A l’image de ses bagnoles, Axel est un cabossé de la vie. La grande faucheuse, il en parle et y pense souvent. Sa plus grande crainte: qu’il ne trouve personne à qui léguer son royaume et que celui-ci tombe dans l’oubli s’il venait à disparaître sous une poutre demain. «J’aime les vieilles machines, les vieux objets: autant de choses qui intéressent peu de monde», constate le jeune trentenaire, dont la quête d’alter ego risque de durer. Deux Axel Wittwer, ça n’existe pas.

Les projets avant le confort

A 15 ans, au moment de fuir le divorce de ses parents, cet ado «un peu différent des autres, contre la technologie» trouve en la mécanique un refuge. «Il faut avoir du courage pour se suicider, mais encore plus pour vivre avec ses problèmes», glisse le Diderain d’origine, déconcertant par son art de la formule et de la débrouillardise. Indépendant bien avant d’atteindre sa majorité, Axel s’est marginalisé au gré de ses pérégrinations à la recherche d’Opel GT, Peugeot 203 ou Renault NN. «J’ai réussi tellement de choses que rien ne me fait peur, pas même une voiture sans roue embourbée je ne sais où. Récupérer un véhicule, c’est toujours une épopée.»

Le sourire aux lèvres et la pipe au bec, sur laquelle il tire généreusement «pour se relaxer», le nomade s’est construit son propre monde, «à la Mad Max». «J’ai un peu mieux compris comment le système fonctionnait durant les cours d’économie et droit de l’apprentissage. Ce système capitaliste, je ne l’aime pas. Idéalement, je vivrais sans argent. Je me contente de peu.» De très peu même… «L’autre jour, je me suis acheté une plaque de beurre. Ça faisait tellement longtemps!»

Naissance

Le 25 septembre 1992. Grandit à Domdidier avec ses deux frères. Habite Granges-près-Marnand.

Parcours 

Apprentissage d’automaticien-aux CFF. Travaille chez Nestlé, à Henniez, de 2012 à 2014. Chef du parc automobile à l’armée (2014-2015).Visar Sorting en 2016, entreprise qui produit des machines de tri de légumes.

Passions

Les véhicules historiques, les vieilles maisons, la musique et les festivals. Membre du Pipe-Club Bienne. Pompier volontaire.

Automaticien de formation, métier qu’il exerce dans une entreprise du Gros-de-Vaud, il passe son temps libre à bricoler. Quitte à dormir directement dans l’atelier. «Un bout de mousse sur l’établi et c’est parti.» Dans sa Ford Fiesta première génération, à même le sol, dans un coffre: Axel pieute n’importe où, sauf dans un vrai lit. Cinq maisons rénovées, en comptant celle d’Henniez, son premier «bébé», mais jamais de chambre ni de commodités. Au confort, il préfère ses projets. «Il me faudra plus qu’une vie pour tous les réaliser», se marre l’intarissable Grangeois. Le plus fou: faire de la Pacotte un musée. Le plus compliqué: sauver la maison voisine, cible d’un projet immobilier, de la destruction. Un morceau de patrimoine là aussi. «Je suis prêt à aller plus loin que le tribunal cantonal. Prêt aussi à vendre mes deux maisons s’il faut mettre davantage que l’argent déjà investi!»

Au nom du patrimoine

Les mains dans le cambouis et la tête dans les étoiles du matin au soir, sept jours sur sept, l’autodidacte monte, dévisse, ponce moteurs et châssis en suivant un idéal à défaut d’un mode d’emploi. «Lorsque j’étais à l’armée, pendant que les autres regardaient des séries, je me suis lancé dans une profonde réflexion: que puis-je faire pour le bien commun? C’est comme ça que je me suis mis en quête de sauver un bout de notre patrimoine. Je peux imaginer qu’à l’ère de la voiture électrique, certains ne comprennent pas ma démarche. Ma foi, que dire: piqueter un mur, démonter une voiture et prendre le temps de tout comprendre, j’aime ça!»

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