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Canton

Malgré l'arrêt de Boncourt, les paysans broyards croient encore au tabac

Alors que le nombre de producteurs chute, des agriculteurs résistent. Rencontre avec deux Broyards

Patrick Maendly producteur de tabac qui résiste alors que le nombre de cultivateurs est en chute libre, Frasses, le 20.07.2023JESSICA GENOUD/©Jessica Genoud/La Liberté

26 juillet 2023 à 01:22

Temps de lecture : 1 min

Culture » Le porte cueilleur, dans lequel six ouvriers ont pris place, avance en ce mardi matin entre les six lignes du champ de tabac de Patrick Maendly, à Frasses. A l’étage, un employé réceptionne les feuilles empilées dans des paniers en fer. Les nuages noirs lâchent quelques gouttes de pluie. «Pour l’instant, on continue la cueillette, mais s’il commence à faire mauvais temps, nous irons dans la halle pour trier les feuilles qui ont été séchées au four», annonce le patron, qui a engagé comme d’habitude des jeunes Français pour travailler cet été. Comme partout ailleurs dans la Broye, la récolte de l’herbe à Nicot vient de commencer et bat son plein jusqu’au mois de septembre.

A une vingtaine de kilomètres de Frasses, à Oleyres, Loïc Miauton est enthousiaste. «Pour le moment, les plantes ont bien poussé. La récolte s’annonce très bonne, la quantité et la qualité sont là», se réjouit-il. Avec Patrick Maendly, il fait partie des 121 producteurs de tabac que compte la Suisse dont 85 proviennent de la Broye fribourgeoise et vaudoise. En vingt ans, les effectifs ont fondu puisqu’ils étaient encore 329 en 2002. Et l’avenir se noircit avec l’annonce récente de British American Tobacco (BAT) d’arrêter la production de son usine de Boncourt (JU).

«La récolte s’annonce très bonne»
Loïc Miauton

Dans l’inconnu

«Nous vivons dans l’inconnu. Le risque est que la quantité de tabac contingentée diminue. Notre coopérative faîtière Swiss Tabac est en train de négocier avec les deux cigarettiers restants (Japan Tobacco International et Philip Morris International, ndlr) pour sauver un maximum du quota 2024 qui aurait dû être livré à BAT. Mais nous avons bon espoir», assure Patrick Maendly. Tout comme Loïc Miauton, il souhaite rester optimiste et peut comprendre que certains collègues décident d’arrêter la culture du tabac pour s’orienter vers d’autres activités agricoles.

«Il faudrait toutefois éviter que la Suisse se retrouve au bout du compte seulement avec dix producteurs de tabac, car nous n’aurons plus beaucoup de poids pour négocier face aux cigarettiers», considère Loïc Miauton. Pour le jeune agriculteur vaudois de 32 ans, le tabac occupe une place importante sur son domaine d’une cinquantaine d’hectares. «J’ai 3,3 ha de burley et de virginie (variétés de tabac), qui constituent une de mes principales rentrées financières. C’est un revenu plus important qu’une culture standard même s’il y a beaucoup d’heures de travail», explique-t-il.

A travers les générations

Lorsqu’il a repris l’exploitation familiale en 2017, qui était auparavant aux mains de son oncle, Loïc Miauton s’est demandé s’il allait continuer le tabac. Mais cette culture fait partie d’un savoir-faire qui se transmet de génération en génération au moins depuis son arrière-grand-père. «J’ai continué, car il y avait toutes les infrastructures disponibles. J’avais peu d’investissement à engager, quelques dizaines de milliers de francs pour des fours pour sécher le virginie. Et lorsqu’on reprend un domaine, on n’a pas forcément l’argent nécessaire pour faire de gros changements. J’avais aussi les connaissances, car le tabac reste une culture exigeante. C’était beaucoup plus facile de continuer ainsi», estime celui qui dispose d’une formation d’horticulteur et d’agriculture. Même si l’avenir est incertain, il reste serein: «J’ai envie de continuer et d’y croire. De toute manière, quelle production agricole est sûre à long terme?» se demande-t-il.

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