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«Decision to Leave» . un thriller sud-coréen qui rappelle Hitchcock

Park Chan-wook revient avec un thriller hitchcockien stylé, virtuose et charnel.

Hae-joon enquête sur la mort suspecte d’un homme. Le détective soupçonne bientôt Sore, la femme du défunt, mais ressent une étrange attirance…

5 juillet 2022 à 15:11

Decision To Leave » Maître incontesté du cinéma sud-coréen, Park Chan-wook (Old Boy, Lady Vengeance, Stoker) revient après six ans d’absence. Son dernier film en date, l’excellent Mademoiselle, avait mis tout le monde d’accord. Son nouveau long-métrage Decision to Leave, un thriller vertigineux abritant une romance impossible, est résolument du même tonneau – il a d’ailleurs déjà séduit le jury du Festival de Cannes, qui lui a décerné son Prix de la mise en scène. Mieux encore, il arrive au moment où les projecteurs internationaux sont braqués sur le cinéma asiatique après le triomphe de son compatriote Bong Joon-ho avec son incontournable Parasite (Palme d’or, Golden Globes et Oscars).

Tout commence comme un récit policier on ne peut plus classique. Après la mort suspecte d’un alpiniste, Hae-joon interroge Sore, la veuve du défunt, qui apparaît bien vite comme la principale suspecte. Cette infirmière chinoise semble même curieusement insensible à la disparition de son mari. Entre elle et l’enquêteur coréen – marié et insomniaque – s’installe un vénéneux jeu de séduction. Regards torrides, filature, alibi… La femme fatale et le détective dansent sur le fil du rasoir. Les obsessions de Sueurs froides d’Alfred Hitchcock sont au coin de la rue.

 

Maîtrise narrative absolue

On le sait, Park Chan-wook est obnubilé par la forme. Sa nouvelle réalisation ne fait pas exception. Decision to Leave fait ainsi preuve d’une maîtrise narrative et esthétique absolue. Déjouant les poncifs du polar, le cinéaste emmène son film sur le terrain de la romance, sans pour autant perdre le fil de son enquête. Chaque séquence, chaque plan ou presque, propose alors une double lecture, multipliant les détails en apparence anodins mais qui trouvent une signification ultérieurement. Le réalisateur n’a peur ni des flash-back, ni des ellipses, ni du grand écart entre le drame et la comédie. Des nuances de ton qui donnent à l’ensemble élégance et finesse. Que la caméra s’envole dans une impressionnante contre-plongée ou qu’elle redéfinisse les bases d’un simple dialogue en champ-contrechamp, elle frappe toujours juste. Park Chan-wook se paie même le luxe de faire naître le suspense dans un simple échange de SMS. C’est décidément du grand art.

Mais la forme, si domestiquée soit-elle, reste une coquille vide si elle n’est pas au service d’une émotion. Et dans ce registre Decision to Leave va crescendo. Le film s’éloigne en effet progressivement du polar dont le seul objectif est de tenir le spectateur en haleine jusqu’à la révélation du nom de l’assassin pour plonger dans une relation amoureuse toxique. Les deux héros – interprétés par la comédienne et mannequin chinoise Tang Wei et par le Coréen Park Hae-il – partagent une histoire certes tordue mais résolument romantique. Une histoire d’amour taillée pour dépasser toutes les conventions sociales et morales, un feu d’artifice éclatant en sourdine, entre non-dits et frôlements sensuels.

Thriller stylé, le nouveau film de Park Chan-wook est une démonstration éclatante du savoir-faire de son auteur. Tout juste pourrait-on lui reprocher un scénario parfois difficile à suivre. Mais quel bonheur de se laisser porter par cet inattendu ballet amoureux se jouant au bord d’un précipice fantasmagorique. C’est chic, sophistiqué et surtout enivrant.

Decision to leave

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