Un sombre conte musical

Annette » Il fallait bien la folie et la créativité de Leos Carax pour coucher sur pellicule Annette, la comédie musicale déjantée des Sparks. Les Sparks? Un groupe de pop-rock-disco californien qui a connu son heure de gloire dans les années 1970 – le titre de Queen Bohemian Rhapsody s’inspire ouvertement d’un de leurs morceaux, This Town ain’t Big Enough for Both of Us – mais qui a acquis depuis le statut de groupe culte grâce à une longue carrière parsemée d’albums sophistiqués et d’une bonne dose d’humour pince-sans-rire. Annette est avant tout leur projet.

Leos Carax? Un cinéaste maudit, porté aux nues avec ses premiers films dans les années 1980 (Boy Meets Girl, Mauvais sang) puis vilipendé par la critique et boudé par le public dès les années 1990 (Les amants du Pont-Neuf, Pola X). Tout cela avant de renaître tel le phénix en 2012 avec l’unanimement salué Holy Motors. Annette est son premier film en Amérique. Et si le film a été choisi pour ouvrir le Festival de Cannes, hier soir, ce n’est pas un hasard: spectacle total (visuel, musical, dansant), ce sombre conte célèbre le retour du cinéma dans toutes ses dimensions, après des mois de disette.

Le Belle et la Bête

A Los Angeles, Henry McHenry (Adam Driver) est un comédien de stand-up sulfureux. Habillé d’un peignoir de boxeur, il harangue son public et n’hésite pas à le faire rire avec des sujets graves et un ton corrosif. Ann Desfranoux (Marion Cotillard) est pour sa part une célèbre cantatrice à la renommée internationale. Sous le regard des paparazzis, le couple fraîchement formé s’épanouit. Mais l’arrivée d’un enfant, la petite Annette – une fillette mystérieuse dont on ne dira pas plus afin de ménager la surprise –, va renverser l’équilibre du couple et faire ressortir les instincts violents d’Henry.